veni vidi vici
Je ne connaissais pas vraiment la peur, mais l'inquiétude je la subissais comme jamais auparavant. Le monde qui se retourne, la vague oppressante que l'on ne peut contrôler seule, le froid parcourant chaque tissu de notre corps. La respiration haletante et rapide, mêlée à ce besoin de vitesse. Réduire cet éloignement à tout prix pour enfin savoir. Voir ses craintes fixées et espéré avoir rêvé ou pouvoir encore trouver une solution. N'avoir qu'un seul objectif, une seule détermination.
Mon corps souffrait lorsque j’explosai ces immenses portes. Je n'étais qu'un bout de chair en souffrance voulant encore me battre. Croyant pouvoir se battre et vaincre. Je serrais morte pour lui. J'aurais tout fait pour lui. Le mot trahison résonnait dans ma tête comme les vibrations d'un tambour. Il me fallait longer les murs pour pouvoir me maintenir debout. Je me sentais étouffé dans ce si grand espace. Mes poumons inspiraient sans jamais être rassasié demandant toujours plus. J'avais défait les lacets du bustier de ma robe sans me soucier de ce manque de pudeur. Mes mains recouvertes de sang gratifiaient le marbre de la rampe grâce à laquelle je me hissais en haut des marches où je tombais à genoux pour vomir ce liquide rouge si précieux. Le goût du sang, le mien, m'émerveillait. J'en ravalais une partie avant que la colère m'envahisse et qu'en hurlant que je ne me relève pour pousser les portes de la salle du trône et y voir le néant. Sa couronne était posée sur le trône, sans lui. Je me redressais en oubliant ce dos brisé pour grimper ces quelques marches et m’asseoir après m'être saisi de ce joyau. Le trône devait être constamment promu. La couronne devait trôner sur la tête d'un Dragonneau quel qu'en soient les circonstances. Je levais péniblement les bras au-dessus de ma tête pour y déposer ce poids lourd en devoir et droits comme en bijoux. Le mot père mourut entre mes lèvres tout pendant qu'Ulrick pénétrait en courant dans la salle. Il me regarda un moment sans rien dire. C'était la première fois que je ne voyais pas sur son visage son sourire mesquin. Les mains sur les hanches il fit d'abord un tour sur lui-même avant qu'il n'aille se mettre à genoux juste devant moi en posant ses mains sur mes cuisses recouvertes de ce tissu rouge sang.
« Tu vas me dire qu'ils vont te le payer c'est cela... J'ai un trône en Suède. Il n'a pour l'instant aucune importance, mais nous lui en donnerons.»Assise par fatalité à ne plus pouvoir supporter mon poids, je laissais tomber ma tête sur le dossier du trône en fermant les yeux. Il n'y avait en moi plus une once de force. J'avais simplement cette haine qui je pense ne me quitterais plus.
« Ma reine... Nous devons partir. »Gardant mes yeux clos je souriais. Comme-ci cela était facile. Comme si rien ni personne ne pouvait quoique se soit.
Je ressentais quelque douleur de cette guerria qui m’arracha une grimace. Plus Kahos et moi vivions en osmose plus je pouvais recouvrer mon existence rapidement. Cela voulait dire souffrir comme je l'aurais dû quelque temps plus tôt. Je dirigeais mes doigts lourd au-dessus de ma tête pour me saisir avec délicatesse de cette couronne que je réduisais avant d'enfiler à mon annulaire gauche.
« Dépêchons-nous... Le temps presse et vous seule savez où nous devons nous rendre. »Père me l'avait dit un jour. Tout le monde avait cru à une plaisanterie, mais moi j'avais compris toute l'importance de ses mots. Père ne disait jamais rien à la légère. Ses paroles étaient toujours purement réfléchies.
Devant moi, la grande porte s'ouvrit finalement pour laisser entrer Phillip. Je ne fus pas surprise. Je savais qu'il aurait veillé toute la nuit pour avoir une version minable d'un garde sur cette micro bataille. Dans sa robe sorcière princière, il me regardait avec son haire de faux grand qu'il avait devant Ulrick. Les traits de son visage changèrent dès le moment où il remarqua la baguette entre mes doigts. Je n'avais pas besoin de lui raconter. Il avait compris. Quelque temps auparavant j'aurais laissé ce prince seul face à son destin. Un destin tragique pour sur. La haine des sorciers bourbeux allait l’assassiner, comme il devait en être pour moi et surement pour Ulrick. Nous nous regardions, silencieux. Je voyais à travers lui mon père. Il était son portrait craché et nul doute que s'il avait eu l'esprit aussi vif que lui, jamais je n'aurais eu une objection à ce qu'il devienne le nouveau roi. Jamais je ne lui permettrais de monter sur le trône et il le savait. Je dirais même qu'il se demandait si à cet instant précis j'allais l'abandonner où le garder. Je ne pouvais laisser le sosie de mon père et son sang mourir aussi lamentablement. Je levais la tête vers le ciel et criais le nom de Mike. Celui-ci apparut automatiquement.
« Vos effets personnels sont déjà prêts. »Je lui faisais un signe de tête et lui demandais de prendre avec lui Phillip, qui me fit un sourire hésitant. Peut-être aurais-je à regretter ce geste à l'avenir, mais Phillip, j'en suis certaine, savais qu'il me devait à cet instant la vie.
« Dépêchons. »Ulrick m'aida à me lever. Avoir chuté de plusieurs étages laissés des traces. J'usais de mes dernières force pour lui prendre le bras et lui dire où nous allions. Il rit un instant comme pour répondre à une plaisanterie, mais il comprit que je n'en étais pas d'humeur. Nous allions léviter lorsque qu'Ester arriva en trombe dans la salle en traînant derrière elle Héléna. Toutes deux semblaient s'être battue et je compris vite qu'elles s'étaient affrontées l'une contre l'autre.
« Artémis... Père aurait voulu que je te suive. Je vais donc le faire quoi que tu en dises... J'ai aussi neutralisé ta mère. Elle a vendu des informations qui auraient pu éviter... ce drame... »Je plongeais mon regard dans le sien. Elle pleurait. C'était la première fois que je la voyais ainsi. Je ne ressentais rien à son égard, je devenais cependant certaine qu'elle n'irait jamais contre ma volonté. Mon regard se perdit un instant sur Héléna qui était dans l'incapacité de s'exprimer. J'allais m'occuper d'elle plus tard.
« J'espère que la forêt ne te fait pas peur. Viens avec elle sans jamais la quitter des yeux et elle doit rester en vie. Une fois arrivée à Zaknafein nous réglerons cela. » Elle hocha la tête avant de poser une de ses mains devant ses yeux. Elle ne devait pas avoir honte de pleurer.
« Partons. »Moi et Ulrick lévitions les premiers. L'arrivée fut désastreuse pour mon corps déchiré. J'avais eu le reflex de me camoufler en partie sous ma cape de sorcier. Il nous fallait attendre un peu, pas longtemps. Le bras d'Ulrick me maintenait avec force. Force que je n'avais plus pour tenir debout. Je luttais encore et encore contre l'envie irrésistible de fermer les yeux. Notre fuite ne pouvait être concluante qu'avec ces gens et j'étais la seule à savoir ce qui allait se passer.
Je ne bougeais pas au sont des arcs se tendant autour de nous. Je ne bougeais pas à ces sphères de lumières qui roulaient jusqu'à nos pieds pour nous éclairer. Il n'y avait autour de nous, que végétation. Les arbres semblaient être les seuls maîtres dans ces lieux, mais c'est un peuple d'un genre ancien qui vivait ici en maître. Je demandais à tous de ne pas faire de bruit et de se taire tout pendant qu'il s’avançait vers nous.
Il avait un grand sourire sur le visage que ses cheveux blancs venaient parfois perturber. Il avait toujours été roi au plus loin que je me souvienne. Il avait toujours ce même visage et était inchangé malgré les années qui c'étaient écoulées. Lui avait bien plus d'année à vivre que nous. Il était déjà bien plus que centenaire, mais avait toujours cette jeunesse.
« La lune m'avait prévenu de votre arrivée. Qu'il est triste de voir dans vos yeux la fin tragique de votre roi. Vous sorcier êtes bien étrange. » « Votre majesté... Je vous prie de m'accorder cette faveur que vous m'aviez jadis promise. »Je vis son visage se lier à un sourire.
« Celle que je vois comme Reine des sorciers ne peut qu'être certaines de ma dévotion en vers sa personne. »Je lui faisais un sourire et entrepris de me saisir de la main qu'il m'avait tendue. Au contact de ces doigts le monde se changea néanmoins en vide noir. J'avais tenu au plus loin que mon corps me le permettait.