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Carte Chocogrenouille Âge du personnage: 19 ans Double-compte: Laila et Margaret Travail/Etudes: Étudiant en Médicomagie, 2e année
Sujet: 'Round midnight - Éléane Dim 19 Juil - 12:39
« Vous devriez mettre des pansements plus souvent, Monsieur Hobbes. »
Le jeune homme acquiesça silencieusement, malgré son envie de crier à l’infirmière qu’il le savait déjà, que c’était la énième fois qu’elle le lui répétait et qu’il n’allait pas plus le faire qu’avant. Mais il demeura calme, composé, serein. Après tout, cette petite femme se souciait de lui, du moins professionnellement. Et Matthias apprenait, peu à peu, la valeur du soin que les autres pouvaient lui donner.
« Et n’oubliez pas de fermer les rideaux avant de vous coucher, pour ne pas que le soleil…»
Cette fois-ci il ne put résister :
« Je sais. »
Il la sentit s’offusquer. Ne voulant pas qu’elle demeure plus longtemps, il s’adoucit en disant :
« Merci de me le rappeler. J’ai quelqu’un qui s’en charge. »
À ce moment, un elfe de maison s’introduisit dans la chambre et salua l’infirmière en baissant humblement sa tête. Il lui demanda si elle avait terminé; elle hocha de la tête avec une pointe de découragement ; il claqua des doigts et la mallette de la petite femme se rangea. Il la reconduisit à la porte puis revint auprès de son maître.
« Merci, Jakby. Peux-tu m’aider à trouver des vêtements pour aujourd’hui? Ma vue est toujours pire après les traitements de la bonne femme. »
« Bien Maître Hobbes. Quel type d’habits serait approprié aujourd’hui? »
« Je vais à la bibliothèque. »
« Très bien. »
Jakby se dirigea furtivement vers l’armoire et sortit une multitude d’habits. Tout en hésitant entre deux chemises différentes, il jeta un coup d’œil au jeune homme qui lui tournait le dos. Il tentait de se débarrasser des pansements qui lui serraient le crâne avec son seul bras mobile, tout en poussant d’occasionnels jurons. Jakby se retourna et secoua doucement sa tête; Maître Hobbes devrait écouter les conseils médicaux qu’on lui donnait. Considérant le type d’études qu’il entreprenait, il devrait se rendre compte des risques qu’il prenait en contestant les prescriptions des médecins. L’elfe avait été content de savoir que son jeune maître avait quitté sa famille; il était déçu, pourtant, d’apprendre que celui-ci ne savait pas comment prendre des décisions ni de se garder en un morceau.
« Je l’ai fait pour quelqu’un d’autre Jakby. »
« Oui Maître Hobbes. Mais Jakby est de l’avis qu’il faut le faire pour soi-même avant de pouvoir le faire pour quelqu’un d’autre. »
« … Tu as sûrement raison Jakby. »
***
Matthias respira profondément : l’odeur des livres, de la poussière et de l’encre renversée le réconfortait énormément. Il posa sa plume et ferma les yeux. Il ne voulait pas une vie mouvementée, il ne voulait pas de guerre, de batailles, de sang, d’impulsivité. Il voulait vieillir dans le silence et dans la paix d’une bibliothèque. Dans un château, loin, dans la campagne, avec sa femme et ses enfants. Il sourit : qui voudrait de lui, maintenant? Et puis, depuis quand voulait-il s’installer tranquillement dans un ménage stagnant? Il ouvrit les yeux et rit.
***
« Je sors ce soir Jakby. Prépare mes vêtements. »
***
Depuis l’ouverture de l’Université Magique, les bars sorciers s’étaient multipliés à Londres. Le Chaudron Baveur n’était plus du tout en vogue, et les étudiants cherchaient des lieux beaucoup plus animés pour passer leurs soirées. Chaque boîte se ressemblait vaguement, les unes aussi bruyantes que les autres, toutes avec un plancher sale et collant. Certaines d’entre elles étaient plus communes que les autres, qui, elles, se démarquaient par un esprit singulier. Sorcières et Sirènes est reconnue pour avoir des tables à la fois dans les airs et sous l’eau, tandis que Le cor du Centaure attire ses clients avec un impressionnant big band composé de nains.
Ce soir, Matthias fut attiré par l’ambiance suave et les lumières tamisées du Château d’Ava Mucklebridge. L’intérieur du bar ainsi que les gens qui l’occupaient étaient de bon goût, et Matthias pouvait se sentir à l’aise; depuis sa disgrâce auprès de l’Anneau de Jade, il n’avait pas pu fréquenter des gens haut-placés et la qualité de la conversation (ainsi que le ton condescendant) lui avait manqué.
Se faufilant entre les chaises et les tables, il se rapprocha des musiciens : un pianiste, un trompettiste, des saxophonistes, un batteur et un contrebassiste débutaient une séquence de jam avec un trait traditionnel de « ‘Round midnight ». Les notes perçantes des cuivres venaient faire mal, là, à l’intérieur. Le jeune homme se reposa contre un mur et ferma les yeux. Il commençait à avoir la tête qui tournait et ne voulait pas s'évanouir devant tant de personnes: sa dignité serait bafouée.
Quelques minutes plus tard, une jeune fille l'accosta pour lui demander s'il désirait une consommation. Il tenta de la faire disparaître par sa pensée, mais après de vains essais, il opta pour un whisky, sur glace. Il n'avait pas parlé depuis longtemps et il émit des mots rauques et corsés. Elle fut clairement désenchantée et se dépêcha de décamper, pour ne pas être plus longtemps en présence de cet homme inquiétant. Une fois qu'elle fut partie, il rouvrit un oeil, puis l'autre. Sa tête empirait et il n'avait plus le goût d'être en société.
Il se dirigeait vers la sortie lorsqu'un rire familier résonna tout près. Il se retourna doucement, sans faire de mouvement brusque, et aperçu une jeune femme assise à une table, touchant aimablement le bras de l'homme en face.
« Monsieur, votre whisky.»
« Ouvrez-moi un compte et mettez-le dessus, s'il vous plaît. Je m'installe ici. »
Éléane I. Greengrass ♦ Faculté de Politique ♦
Messages : 258 Date d'inscription : 08/12/2013
Carte Chocogrenouille Âge du personnage: 19 Double-compte: Elada L. Enatari Travail/Etudes: étudiante en deuxième année de politique
L'appartement était vide et n'émettait, comme unique plainte, que quelques bruits de parquet vieilli. Sur le sol ruisselaient les premières lueurs de l'aurore, donnant une teinte de ténèbres fuyantes à ce bois qui pleurait. Les nuits étaient inquiétantes, mais peut-être plus encore les premières heures de l'aube. Indécises, elles hurlaient et chantaient à la fois ; chassaient les cauchemars mais appelaient la réalité. Et en ce moment elle ne savait, ce qui du mauvais rêve ou du tangible était le plus difficile à vivre. Les périodes de sommeil étaient longues et courtes en même temps : elles amenaient plus leurs lots de cris, d'images douteuses et de douleurs que de repos, à un tel point qu'Éléane aurait souhaité ne plus jamais s'endormir. La journée pourtant, elle n'aspirait qu'à l'étoffe confortable de ses draps. Partout, la douleur l'enveloppait, physique ou mentale, au choix et selon la préférence. Mais au moins avait-elle, depuis quelques jours, regagné son foyer et recommencé un semblant de vie. Margaret s'y était opposée, mais les quatre semaines qu'elle avait passées éveillée chez elle n'avaient fait qu'accroître le malaise ressenti à son réveil. Trois mois d'un sommeil forcé avaient requis les plus grands soins, non seulement ceux d'un médicomage membre de l'Ordre, mais également ceux de son hôte. Si elle était reconnaissante de toute l'attention qu'ils lui avaient portée, elle ne pouvait néanmoins admettre de vivre plus longtemps à leurs dépens et il lui fallait, qu'elle le veuille ou non, reprendre le cours de ses activités. La jeune maman trouvait son départ anticipé, son invitée, quant à elle, pensait qu'il n'avait que trop tardé.
Elle avait donc regagné son logement, non sans rester étroitement surveillée par leurs deux nouveaux parents qu'étaient presque devenus pour elle, durant cette période, Alistair et Maggy. Au tout début, le plus difficile n'avait pas tant été de se rendre en cours que d'effectuer toutes les petites tâches du quotidien : se lever, faire sa toilette, se déplacer, se nourrir. Car si elle s'appliquait à faire bonne figure lorsqu'elle se trouvait en société, la chose n'en restait pas moins compliquée, et devenait quasiment impossible une fois qu'elle était seule à nouveau. Par moments, son corps se lamentait tant qu'il l'immobilisait durant de nombreuses heures, ce qui, en plus de l'amoindrir dans ses capacités, était source de culpabilité : elle n'avait jamais rien trouvé de plus annihilant que l'inactivité.
Par chance, William avait été en tous points charmant et avait redoublé d'attentions à son égard. Selon Margaret, il était venu la voir plusieurs fois alors qu'elle était dans le coma. Elle n'était pas certaine que cela fut d'une quelconque utilité, mais il ne mit pas longtemps à lui rendre d'autres visites après son réveil. Elle avait refusé de le voir d'abord. Se montrer malade, faible et alitée ne l'intéressait pas, et elle n'avait daigné le recevoir que lorsqu'elle avait été en mesure de se déplacer seule et d'offrir un semblant de bonne mine. Il avait tenu à être à ses côtés souvent, à l'aider plus que de raison, elle avait refusé également. Bien malgré elle, sa fierté l'empêchait de tolérer l'idée de dépendre de quelqu'un. Mais il fallait avouer que son acharnement lui avait arraché quelques sourires amusés qui l'avaient menée, si pas à vouloir de son aide, tout au moins à apprécier à nouveau sa compagnie.
Si William avait été charmant, Matthias l'avait moins été. Pour autant, cette fois, il n'avait pas fui, et elle l'avait revu deux fois déjà, mais leurs entrevues n'avaient pas duré. S’afficher faible et pathétique ne les avait jamais enjoués. Elle avait simplement été soulagée de le savoir sur la voie de la guérison et avait plus que digéré l'idée de le retrouver plus tard, elle ne savait pas quand. Sans savoir pourquoi, elle se surprenait néanmoins à penser souvent à lui ces derniers temps. Sans doute les souvenirs de la bataille la hantaient-ils plus qu’elle ne voulait se l’avouer, sans compter cet indéfinissable sentiment collant qui lui hurlait sa culpabilité quant à l'état de l'ancien Serdaigle et qu'elle avait tant de mal à le supporter.
Toutes ces pensées amères la hantaient, mais devaient cesser. William arriverait bientôt, elle avait accepté de le voir aujourd'hui, plus pour lui faire plaisir que pour se satisfaire elle-même, mais cela ne changeait rien aux faits. Elle serait bien restée au lit, mais on lui serinait inlassablement que la vie était belle, là-bas, dehors. Pour l'heure, elle avait du mal à y croire, mais elle essaierait quand même.
***
Le menton appuyé sur ses mains jointes, les coudes sur la table, elle l’entendait parler, calmement, placidement, mais bien qu’elle aurait voulu se concentrer sur ses paroles, elle ne l’écoutait pas. Et tandis que ses gestes inégaux se découpaient par saccades sur fond de silence, elle se surprenait à songer à celui que, bien malgré elle, elle avait blessé. Que faisait-il, en cet instant où elle contemplait ce faible automate se débattre avec ses paroles et brasser l’air ? Elle sourit. Elle sourit pour acquiescer, marquer son attention. Ainsi, la tête légèrement penchée sur le côté, effleurant lointainement son visage de ses prunelles absentes, elle se demandait ce qu’elle avait bien pu lui trouver autrefois.
***
Les rues grouillaient d'étudiants libérés : libérés de leurs contraintes et obligations, des pressions sociétales, de leurs carcans familiaux, des semblants et faux-semblants que véhiculent les heures de clarté. Tous se pressaient dans les rues pour rejoindre les cafés les plus branchés de la ville où ils trouveraient de quoi jouir de leur jeune vie d'insouciance jusqu'aux premières effluves du matinales, mélanges d'alcool et de luxure. À ses côtés, William marchait calmement, ses traits lisses et bien dessinés balayant les allées dans l'espoir de trouver le chemin le moins peuplé. Bientôt, ils arrivèrent devant le Château d'Ava Mucklebridge, un endroit branché où les jeunes de bonnes familles aimaient à se retrouver et à écouter de la musique qu'ils jugeaient être de bon goût. Quand ils franchirent la porte, ce fut du jazz qui leur emplit les oreilles, un peu trop fort peut-être, mais elle avait toujours aimé les tons suaves des notes cuivrées qui se mêlaient aux teintes claires des claviéristes. S'il s'agissait d'un exercice de revalidation, l'endroit n'était, en définitive, pas si mal choisi.
Tout en détaillant la nouvelle décoration de l'endroit, elle fit un pas et sentit une main dans le creux de son dos l'inviter à avancer un peu plus, ce qu'elle fit sans rechigner. Ils n'avaient marché que très peu, mais elle avait déjà grand besoin de s'assoir. Venir n'était peut-être pas une idée si brillante que cela, finalement.
***
Face à elle, le jeune homme contait ses histoires et s'esclaffait délicatement, s'arrêtant de temps à autre pour écouter les douceurs musicales qui régalaient leurs oreilles. Il avait tenu à lui offrir à boire, elle avait opté pour une un spiritueux ce qui, elle le savait, lui était fortement déconseillé. Boire de l'alcool quand son système digestif se remettait d'un sort des plus virulents et potentiellement mortel n'était pas particulièrement une bonne idée, mais un seul verre ne lui ferait pas de mal, et promis elle n'en boirait qu'un. Elle n'était pas enceinte, après tout. Pourtant, la tête commençait déjà à lui tourner et à lui embrouiller les sens et la fatigue ne tarderait pas à avoir raison d'elle. Elle n'était plus certaine d'avoir mangé aujourd'hui ce qui, au vu de sa récente maigreur, n'était pas un brillant constat. Finalement, elle le terminerait plus tard, ce verre.
La musique la berçait, l'ambiance l'entêtait et les œillades fréquentes de l'étudiant qui l'accompagnait la rassuraient. Elle s'était sentie si éloignée du corps qu'elle avait récemment laissé mourir sur le toit de la maison de Victoire qu'elle avait l'impression de le reconquérir un peu à chaque contact. Ce n'était pas désagréable. Ce n'était pas désagréable mais, pour l'instant, elle avait besoin de marcher un peu, de respirer autre chose que l'air vicié de trop de présences. Elle en informa le joli blond qui l'accompagnait, mais celui-ci finit par la convaincre de rester quelques minutes supplémentaires ; ils s'aéreraient ensuite. Lentement, elle reporta donc son attention sur le groupe qui performait allègrement sur la scène quand, à sa gauche, elle crut reconnaître, accotée sur un mur, une silhouette oblongue et familière. Cette image, brouillée dans l'obscurité des lieux, la troubla, ce que ne manqua pas de remarquer William et ses surplus d'attention. Il posa sa main sur son bras, s'enquit de son état et quand elle tourna la tête à nouveau, l'ombre avait disparu. Avait-elle rêvé ? Probablement.
Les secondes passèrent encore, comme au compte-gouttes, longues de souffrances. Se sociabiliser était plus nécessaire qu'aisé. Le surplus de respirations confinées l'oppressait et ses entrailles, par moments, criaient leur désir de solitude et d'air frais. Entre deux notes suaves, William lui faisait la conversation, elle lui répondait, riait même quand elle le pouvait, et puis désirait s'enfuir de nouveau. Il était temps pour elle de sortir, et seule, pour se libérer quelques instants du poids des conventions qui la forçaient à se tenir droite et à étirer les lèvres pour complaire aux inconnus.
Se levant, elle refusa l'aide que lui proposa aimablement Will'. Il se redressa néanmoins, mais dut rapidement consentir à la laisser aller seule. Elle n'était ni enceinte ni impotente, merci. Lui offrant un dernier regard inquiet, il laissa glisser sa main le long se son bras et focalisa à nouveau son attention sur le groupe qui occupait la scène. Et alors que la brune se faufilait entre les tables, elle crut reconnaître, là, dans l'obscurité, sur la droite, cette figure qui lui était si familière. Le sourire aux lèvres, elle força son maintient et bifurqua pour s'avancer vers ce long fantôme qui n'avait visiblement pas été le fruit de son imagination. Lentement, elle s'approcha et lui parla d'un voix usée, mais néanmoins enjouée.
« Matthias ? »
Absolument pas décontenancé, son ami ouvrit les yeux et la contempla comme s'il s'était attendu à la trouver en cet endroit. Elle en profita pour le détailler de ses grands yeux gris, à nouveau parfaitement éveillés : bien que visiblement fatigué, il offrait une meilleure apparence qu'une dizaine de jours auparavant. Dans l'ombre, sa pâleur semblait presque naturelle et l'écharpe de son bras lui donnait, à peu de choses près, aspect de rebelle indomptable, ce qu'il n'était évidemment pas. Intérieurement, elle s'égaya de ce constat.
« Qu'est-ce que tu fais là ? », s'enquit-elle.
Ce disant, elle jeta un regard circulaire autour d'elle dans l'espoir de trouver qui l'accompagnait, et elle sentit peser sur elle les iris du sorcier qu'elle venait de quitter. Elle ne s'en inquiéta pas et reporta son attention sur le futur médicomage.
« Tu es seul ? »
Sincèrement ravie de le trouver là, elle lui souriait avec douceur, mais son regard était suspicieux. Que faisait le jeune Hobbes à écouter du jazz seul alors qu'il semblait visiblement faire des efforts pour se contenir ? Ne devrait-il pas, comme elle en ce moment, aspirer à retrouver l'ambiance tamisée de sa chambre plutôt que les odeurs surchargées des rues londoniennes et de leurs bars bouillonnants ?
Dernière édition par Éléane I. Greengrass le Dim 6 Sep - 19:28, édité 1 fois
Matthias J. Hobbes ♦ Faculté de Médecine ♦
Messages : 836 Date d'inscription : 07/11/2012
Carte Chocogrenouille Âge du personnage: 19 ans Double-compte: Laila et Margaret Travail/Etudes: Étudiant en Médicomagie, 2e année
La jeune femme qui servait des bières-au-beurre au couple à côté de moi devint vite intéressante lorsqu'Éléane se retourna vers moi. Elle avait des cheveux blonds rattachés en queue de cheval à l'aide d'un ruban violet, duquel quelques mèches s'échappaient et venaient joliment encadrer son visage. Elle affichait un sourire franc et ses joues étaient roses; son vocabulaire était parsemé d'un rire chaleureux, quoiqu'un peu trop aigu pour moi, et elle répondait avec tact aux remarques subtilement inappropriées des clients masculins. Elle avait tout-à-fait sa place ici, dans le domaine de la restauration, parmi des corps fatigués qui venaient un moment se poser sur un tabouret pour tranquillement (ou violemment) s'intoxiquer. Elle avait plus sa place ici qu'Éléane, qui m'avait refusé une sortie l'autre jour, prétextant se soucier de ma condition physique.
« Qu'est-ce que tu fais là ? »
Mes prunelles quittèrent la serveuse et se dirigèrent directement vers celles d'Éléane, espérant qu'elles crèvent ses airs d'innocence. Je lui en voulais d'être sortie sans moi, mais surtout, j'étais fâché de l'avoir croisée. Je lui en voulais et tout mon ressentiment s'était bâti pendant que la fixais en train de se dérider publiquement aux remarques anodines de son cavalier. Je lui en voulais d'être venue me voir, pour qu'elle puisse me narguer, m'asticoter, me rappeler à l'ordre et m'envoyer paître dans une chambre close, la tête enrobée de lambeaux et un elfe de maison m'apportant mes petits-déjeuners au lit.
« Je sors. »
Et voilà, je commençais la conversation d'une manière traditionnelle. C'était ma façon de l'avertir, de lui conseiller de faire gaffe car la joute verbale allait bientôt suivre. Éléane me connaissait depuis assez longtemps pour comprendre que si j'avais été disposé à lui parlé, je lui aurais déjà sorti une tirade sur les événements de ma soirée ainsi que des remarques un peu sexistes sur la présence saturée de jolies filles dans la boîte. Ma réponse bisyllabique contenait assez d'information pour qu'elle choisisse de décamper. Mais elle ne put s'empêcher de peser sur un autre bouton.
« Tu es seul ? »
« Mieux vaut être seul que de m'attacher un boulet au pied. Où as-tu déniché celui-là? Dans ton dossier "erreurs de jeunesse"? C'est un peu humiliant, tu ne trouves pas, de sortir un mec qui salive dans ton visage simplement pour te prouver que tu es encore femme? Tu sais bien que tu te donnes une tâche impossible, alors arrête de te leurrer. »
Je savais que je creusais ma propre tombe. Toutefois, je ressentais à ce moment même l'adrénaline parcourir mon corps et je me sentais soudainement vivifié. Ce n'était pas bien de rappeler à Éléane que son corps était détruit. Ce n'était pas bien, non. Mais c'était tellement satisfaisant.
Éléane I. Greengrass ♦ Faculté de Politique ♦
Messages : 258 Date d'inscription : 08/12/2013
Carte Chocogrenouille Âge du personnage: 19 Double-compte: Elada L. Enatari Travail/Etudes: étudiante en deuxième année de politique
La confrontation, puisque il y en aurait une, commençait mal. Rien d’inhabituel. Avec Matthias, il y avait toujours une chance sur deux pour que les conversations démarrent sur la mauvaise pente. Une de plus, une de moins, elle y était accoutumée et avait pris pour bonne habitude de ne pas s’en formaliser. Tout en l’observant, elle attendait donc placidement que viennent les reproches qui allaient avec sa mauvaise humeur, puisque, de toute évidence, il avait finalement décidé que rester à l’intérieur à fixer les mouvements gauches et fades d’une midinette blonde serait plus approprié. Du grand Matthias. Rien de surprenant non plus.
« Mieux vaut être seul que de m'attacher un boulet au pied. Où as-tu déniché celui-là? Dans ton dossier "erreurs de jeunesse"? C'est un peu humiliant, tu ne trouves pas, de sortir un mec qui salive dans ton visage simplement pour te prouver que tu es encore femme? Tu sais bien que tu te donnes une tâche impossible, alors arrête de te leurrer.»
La tête légèrement penchée sur la droite, Éléane écouta les doléances de son ami sans ciller. Ses expressions neutres n’avaient plus de secret pour lui, libre à lui de les interpréter à sa convenance, elle s’en fichait, après tout. Quand il se mettait dans cet état – souvent sans raison valable, s'il fallait encore le souligner – elle n’avait jamais vraiment cure de ce qu’il pouvait penser ou manigancer. Il était idiot et infantile, rien du nouveau. Méchant et bête, aussi. Voilà qui résumait bien la situation ainsi que toutes celles, similaires, où il avait déversé sa pseudo-ivresse sur ses épaules. Il ne l’impressionnait pas, seulement peut-être, l’agaçait…
…S’était-il vraiment extirpé de ses draps pour venir l’épier ici – comment avait-il seulement su qu’elle se trouverait là ? – et témoigner ainsi d’une espèce de jalousie injustifiée ? L’idée sonnait creux, tellement creux qu’elle eut envie de lui rire au nez et de s’en aller rejoindre William, simplement pour le narguer ou lui montrer qu’après tout, son côté pénible la lassait. Mais cette idée lui traversa à nouveau l’esprit tel un éclair. Jaloux ? Se montrait-il vraiment jaloux ? C’eût été tellement puéril et ridicule qu’elle avait peine à y croire. Mais l’étudiant maîtrisait plus souvent que de raison le subtil art et la délicate manière de se couvrir lui-même d’opprobre quand sa tendance coléreuse souffrait d’éclore au vu et au su de tous.
Hey, Matthias, contiens-toi ! T’es dans un lieu public là, à quoi tu joues ? Oui, je sais, blablabla, tu n’es pas content, bla bla bla ! Tu es mal léché, blabla, tu simules le vieil ours, tu crois que t’as l’air viril, je sais ! Mais hey, oh, reprends-toi !
Ce n’est que péniblement qu’elle retint sa réplique. Il le savait, elle le savait et, contrairement à lui, elle n’était pas là pour lui apprendre les bonnes manières. Mais ce n’était pas pour autant qu’elle se priverait de lui livrer le fond sa pensée. Elle n’avait jamais bien endossé le rôle de la petite créature chétive qui courbe le dos sous les reproches, et son corps débile ne justifiait pas plus qu’auparavant qu’elle s’y essaye.
« Pas plus humiliant, mon cher Matthias, que de m’épancher en public. Depuis quand l’alcool se traduit-il chez toi par un tel manque de retenue ? Oh, ne te méprends pas, je me moque bien de l’image que tu peux renvoyer, mais j’avoue que tu me déçois. »
Marquant une brève pause, elle tourna la tête vers William qui les observait discrètement et dédia à nouveau toute son attention au futur médicomage.
« Mais enfin, il faut bien l’avouer, la jalousie ne t’a jamais avantagé, et moins encore dans ton état. Mais ne t’en déplaise, je ne rentrerai pas publiquement dans ton petit jeu niais pour satisfaire ton égo démesuré. Si tu veux bien m’excuser, je m’étais levée pour aller prendre l’air, et puisque tu ne t’es finalement pas décidé à sortir et a préféré te rabaisser à sortir la carte de la perfidie gratuite, je me dévoue pour prendre la relève. S’il te prenait l’envie de me présenter des excuses, tu saurais où me trouver ».
Et concluant d’une voix sereine sa tranquille répartie qui, elle le savait, ne manquerait pas de vexer le bellâtre, elle se dirigea vers la sortie. Elle espérait que l’air frais lui ferait oublier l’envie qu’elle avait ressentie de le gifler, mais également les courbatures qu’avaient su éveiller trois lamentables gorgées de liqueur.
Quand le vent vif et froid lui emplit enfin les poumons, elle repensa à ses propos. Répondre à une répartie sur son état physique par une réplique d’un même acabit était vraiment petit, minable même, d’autant qu’elle savait à quel point l’ancien Serdaigle pouvait être soucieux de son apparence. Ca n’en n’était pas moins libérateur. Tous deux étaient vraiment parfaits quand il s’agissait de se blesser mutuellement et de se quereller comme des commères sur la place publique. Ce n’était peut-être ni le moment ni le lieu idéal, mais pour la première fois depuis plusieurs mois, elle se sentit vivre réellement. Elle l’aurait presque remercié, si sa fierté ne l’en avait pas empêchée.
Mais vivre intensément, voilà qui était fatiguant. Aussi se décala-t-elle sur la droite et, pour reprendre le souffle qu’elle avait laissé traîner quelque part chez Victoire Weasley, s’accota sur le mur de briques rouges de l’établissement. De ce côté-ci du bâtiment, la foule était moins nombreuse, pour ne pas dire presque absente. Quelques mètres à sa gauche, un ivrogne brassait l’air de paroles douteuses adressées à un destinataire fantôme quand, non loin sur la droite, deux personnes d’à peu près son âge se disputaient sur un sujet qui lui échappait à coups de grands gestes théâtraux. C’était tout. Elle était, pour ainsi dire, seule, et cela lui faisait un bien immense.
Sans raison apparente, elle s’imagina alors sortir une cigarette comme l’aurait fait Matthias pour se calmer, et rit intérieurement de cette situation hypothétique. Pour un peu, elle l’aurait presque oublié, lui et ses motifs de griefs insensés, mais c’était sans compter sur cette image absurde. Voir son ami le mégot aux lèvres avait toujours cassé chez lui la moindre posture séduisante.
Sa chevelure brune ballota de gauche à droite. Qu’importe sa jalousie inutile et imbécile, après tout, elle lui passerait, comme toujours.
Sur cette réflexion, elle soupira et inclina la nuque jusqu’à rencontrer la façade de l’endroit pour profiter de la petite bruine qui flottait dans l’air et qui rendait la musique qui émanait de l’intérieur presque irréelle. Les nuits anglaises savaient être si belles et avaient toujours si bien su l’apaiser qu’elle resterait désormais éternellement dehors ; personne ne viendrait la trouver ici.
Matthias J. Hobbes ♦ Faculté de Médecine ♦
Messages : 836 Date d'inscription : 07/11/2012
Carte Chocogrenouille Âge du personnage: 19 ans Double-compte: Laila et Margaret Travail/Etudes: Étudiant en Médicomagie, 2e année
Je n'allais pas gagner cette bataille. J'avais tort. Je l'avais provoquée sans raison. Et pourtant, le délice du mal attisait mes intentions plutôt que de les éteindre. Tout à coup, je me souvenais pourquoi j'aimais m'entourer de gens : j'aimais le rush qui habitait mon esprit lorsque j'arrivais à les piquer. J'aimais connaître exactement ce qui allait les pousser à bout, les forcer à se battre avec moi. J'aimais la satisfaction de pouvoir initier le combat, simplement parce que je connaissais l'autre personne. Ces joutes verbales, comme j'aime bien les appeler, sont parfois des taquineries, parfois des railleries et parfois des insultes. À Poudlard, où j'étais maître chez moi, c'était si facile initier le piquant dans une conversation. Et puis un jour, lorsque je n'ai pas pu saisir la personne, un jour, j'ai blessé quelqu'un. Au-delà des mots, au-delà de l'estime de soi : j'ai intentionnellement fait du mal à un autre être humain. À une petite fille. Et ce jour-là, ce jour-là j'ai véritablement goûté quelque chose de divin. Mais les conventions du monde m'ont remis dans un moule ; j'ai focalisé mon goût pour le mal à travers des causes plus "nobles" ; je me suis repris en main ; je suis resté sage, je suis resté sobre.
Et maintenant, je redécouvrais c'était quoi, faire mal. Surtout, je redécouvrais c'était quoi faire mal à ceux qu'on aime.
« Pas plus humiliant, mon cher Matthias, que de m’épancher en public. Depuis quand l’alcool se traduit-il chez toi par un tel manque de retenue ? Oh, ne te méprends pas, je me moque bien de l’image que tu peux renvoyer, mais j’avoue que tu me déçois. »
C'est exactement ce que je voulais. La satisfaction débordait de la rétorque qu'Éléane venait de me livrer. J'avais envie de me rapprocher d'elle et de lui faire répéter son mécontentement.
« Mais enfin, il faut bien l’avouer, la jalousie ne t’a jamais avantagé, et moins encore dans ton état. Mais ne t’en déplaise, je ne rentrerai pas publiquement dans ton petit jeu niais pour satisfaire ton égo démesuré. Si tu veux bien m’excuser, je m’étais levée pour aller prendre l’air, et puisque tu ne t’es finalement pas décidé à sortir et a préféré te rabaisser à sortir la carte de la perfidie gratuite, je me dévoue pour prendre la relève. S’il te prenait l’envie de me présenter des excuses, tu saurais où me trouver ».
Nos disputes avaient toujours été le noyau de notre amitié ; c'est pour cela que nous sommes restés amis, après toutes ces années. Éléane pouvait être aussi déplaisante que moi et savait toujours me rendre la pareille lorsque je lui lançais un trait plus ou moins insultant. Cette fois-ci, je ne me sentais pas particulièrement blessé par ses paroles, mais plutôt par ses gestes. Sa rétorque était entremêlée de regards furtifs dirigés vers William, ce morveux qui avait l'air de vouloir venir sauter à sa rescousse, la protéger du vieux méchant loup. Je n'ai jamais aimé ce type. Lorsqu'Éléane avait daigné s'accoupler avec lui en sixième, il s'était infiltré dans mon cercle et avait joué au bon gars qui aime tout le monde. Il m'écoeurait lorsque nous étions collégiens, il m'écoeurait encore maintenant. Qu'Éléane cherche sa compagnie encore aujourd'hui me mettait le feu au sang.
Ne voulant pas rester face à face avec le crapaud en question, je suivis Éléane presqu'au pas et fut témoin de sa faiblesse contre le mur. Une vague d'empathie en moi surgit ; je voulais aller l'aider à se relever, à l'emporter là où l'air était plus pur. Je savais qu'elle était encore blessée, qu'elle le serait probablement toujours, et j'avais envie de l'aider. Cependant, la fierté reprit le dessus et je ne fis que la narguer à nouveau.
« Tu sais, je ne pensais pas que tu étais une fille à boîte. »
Mon tour de vouloir faiblir, mon tour d'essayer de trouver un appui contre le mur en brique. Essayant de me sauver la face, je sortis de ma poche une cigarette et l'allumai, aussitôt m'éloignant de ma béquille.
« Tu es un peu rouillée, tu sais. Tu aurais pu me répondre autrement, là-dedans. Je sais que tu ne te prendras pas à mon jeu, je sais que tu trouves que je suis puérile, enfantin, jaloux... Jaloux? Puis-je l'être vraiment? Ce Willy n'en vaut pas la peine. Je te déçois? C'est plutôt toi qui me laisse tomber. Je te livre une parfaite insulte et tu me réponds avec des reproches de mère.»
Je pouffai une nuée de fumée en direction d'elle, sachant parfaitement qu'elle détestait ça. Mais je ne voulais pas fumer, alors je jetai la moitié de mon mégot par terre.
« Et je ne m'excuserai pas », murmurai-je, en m'approchant de la jeune femme, le ton quelque peu troublé, visqueux.
Mon visage se retrouvait à deux pouces du sien et je sentais son haleine chaude se mêler à mon souffle qui empestait le tabac. Un éclair dans ses iris vertes. Elle me voulait hors de là.
Je reculai en laissant s'échapper un rire rauque.
« Tu gâches ma soirée. J'étais bien content tout seul, avec mon jazz. Et puis tu devais valser avec ton William. Bien sûr.»
Je me retournai et lançai un bombarda sur une poubelle avoisinante. Des rats, surpris, s'éparpillèrent partout, leurs queues en feu.
« Désolé. Je ne pouvais quand même pas diriger le sort vers toi. Ça aurait fait trop de dégâts.»
Éléane I. Greengrass ♦ Faculté de Politique ♦
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Elle sursauta. À sa gauche se tenait Matthias et ses airs furieux mais, bien qu’elle se redressa en constatant sa présence, c’est à peine si elle lui adressa un regard. Elle savait qu’il ne l’avait certainement pas suivie pour s’excuser, bien qu’un tel geste aurait pu jouer en sa faveur. Mais elle le connaissait trop bien que pour imaginer quoique ce soit de similaire. En y repensant, elle n’était d’ailleurs pas certaine qu’il lui ait jamais formulé une quelconque forme d’excuse. Il la désespérait.
Elle railla : « Je suppose que tu es venu pour t’excuser ? »
L’ironie qui déteignait sur ses paroles fut accentuée par une intonation des plus acerbes. Elle s’était fait une joie de le croiser là, par hasard, mais elle n’avait désormais plus aucune envie de le voir. Si elle avait pu simplement battre des cils pour le renvoyer de là où il était venu, nul doute qu’elle se serait essayée à l’exercice. Mais puisqu’il lui avait fait l’immense honneur de la rejoindre, elle savait qu’il ne manquerait pas de ponctuer l’instant d’une autre remarque déplacée de son cru.
« Tu sais, je ne pensais pas que tu étais une fille à boîte. » « Visiblement pas. Le contraire m’aurait surprise. Mais tu n’es pas un homme de surprise, hein, dis-moi, Matthias ? »
Bingo. « Une fille à boîte ». Elle retint son rire. Elle ne voyait pas en quoi venir s’attabler pour écouter du jazz dans un endroit aussi bien fréquenté que celui-ci faisait d’elle « une fille à boîte » ni pourquoi sa propre présence en « boîte » était plus tolérable sous prétexte qu’il était un homme. La remarque était facile, d’autant plus facile qu’il l’avait lui-même déjà accompagnée ici. Pour autant, elle ne lui fit pas le plaisir de rougir ni de justifier sa présence en ces lieux, se contentant simplement de lui rendre la coquetterie : « Déçu, Hobbes ? », d’un ton de provocation à peine dissimulé et qui ne cachait rien de son ras le bol ou de sa propre déception.
Tout en allumant l’une de ses horribles cigarettes, le jeune homme continua cependant sur sa lancée, un faux air de grands discours sur la figure.
« Tu es un peu rouillée, tu sais. Tu aurais pu me répondre autrement, là-dedans. Je sais que tu ne te prendras pas à mon jeu, je sais que tu trouves que je suis puéril, enfantin, jaloux... Jaloux? Puis-je l'être vraiment? Ce Willy n'en vaut pas la peine. Je te déçois? C'est plutôt toi qui me laisse tomber. Je te livre une parfaite insulte et tu me réponds avec des reproches de mère. »
William, bien sûr. Là était donc vraiment le problème. Matthias ne l’avait jamais beaucoup aimé, et les années n’avaient visiblement rien changé à la situation. Elle se souvenait des nombreuses altercations qui avaient eu lieu entre eux, et des quelques fois où leurs échanges manquèrent bien de devenir autres que verbaux, et elle espérait sincèrement que cela ne se produirait pas ce soir. Elle n’avait cure de les contempler se pavaner et jouer aux paons fiers, elle voulait juste être tranquille, rentrer chez elle et leur laisser le champ libre pour se déchirer une bonne fois pour toutes et enfin lui foutre la paix. Elle voulut faire part de cette remarque à l’homme qui lui faisait face, mais celui-ci, après l’avoir volontairement asphyxiée de sa fumée nauséabonde, s’approcha dangereusement d’elle, jusqu’à presque toucher son visage du sien
« Et je ne m'excuserai pas »
Les yeux d’Éléane sondèrent les siens et y découvrirent une expression nouvelle qu’elle ne parvint pas à déchiffrer. Que faisait-il ? Son ton était dur, froid et sans nuance, et sa posture celle d’Elegius dans ses pires humeurs. Elle ne supportait pas de retrouver son frère en Matthias, elle s’était, il lui semblait, suffisamment démenée pour ne plus souffrir son irascibilité latente. Sur cette pensée, ses veines se dilatèrent et s’emplirent d’une violence totalement inattendue, une violence mêlée de désespoir et qu’elle ne parvint que difficilement à contenir. Elle voulait qu’il s’en aille, qu’il parte dégager sa pestilence ailleurs, qu’il ne s’approche plus jamais d’elle de la sorte. Il la dégoûtait.
Par chance, il sembla sonder sa pensée car, très vite, il arrêta son geste et, dégageant une hilarité éraillée, continua sa petite scène à coups d’attitudes grandement affectées.
« Tu gâches ma soirée. J'étais bien content tout seul, avec mon jazz. Et puis tu devais valser avec ton William. Bien sûr. »
Le voir se caricaturer lui-même de la sorte était tellement risible que, cette fois-ci, elle ne put s’empêcher de se gausser franchement. Oh, voyons, Matthias ! De rire de la situation, d’elle-même aussi, de son envie de ne même pas riposter, mais surtout de lui, qui s’escrimait sur une futilité. Mais ne t’inquiète pas, deary, je ne suis pas en état de danser, tu peux retourner te coucher, je saurai rester sage. Mais Matthias ne devait pas beaucoup apprécier le goût d’évidente moquerie qui accompagnait son rire car, très vite, un bombarda hargneux couvrit les éclats de sa voix.
Toujours adossée sur le mur, Éléane observa ainsi quelques rats se disperser pour échapper à la colère du sorcier, au même moment où, la main enfouie dans sa poche, elle croisait ses doigts sur sa propre baguette. Il ne jouait plus, c’était autre chose, et le dégoût qu’elle éprouvait pour lui s’amplifia.
« Désolé. Je ne pouvais quand même pas diriger le sort vers toi. Ça aurait fait trop de dégâts. »
Sa main se décrispa et elle abandonna sa baguette encore endormie contre sa jambe. C’était Matthias qui lui faisait face, pas l’un de ces hommes qui les avait traqués comme des bêtes dans un sous-bois le soir de Noël. Ce n’était que Matthias. L’amertume de ses paroles n’avait jamais rejoint la puissance de ses gestes, alors elle avait confiance en ce que ce grotesque déballage d’énergie serait le dernier.
L’espace de longues secondes elle resta néanmoins immobile et silencieuse, les paupières écarquillés, encore surprise de spectacle qui venait de se dérouler devant elle. Enfin, elle dirigea ses prunelles grises vers l’étudiant :
« Qu’est-ce que tu essayes de prouver, Matthias ? »
Non loin d’elle, elle remarqua que le garçon qui s’était querellé avec une autre sorcière s’approchait doucement d’eux, la fixant, la pupille pleine d’interrogations, comme prêt à l’aider. Elle n’avait pas besoin d’aide, Matthias savait montrer les dents mais il ne mordait jamais vraiment, et elle n’était elle-même pas une tendre. Il ne l’inquiétait pas. Aussi, rendit-elle un regard et un sourire pleins d’assurance au blondinet qui s’évanouit finalement dans la nuit. Elle reporta ensuite son attention à son ami.
« Tu te gâches ta soirée tout seul, et tu le sais aussi bien que moi. Mais tout ceci est bien peu comparé au nombre d’années où tu as gâché les miennes. C’est peut-être toi, mon erreur de jeunesse, après tout. »
Elle marqua une pause et ses joues s’empourprèrent d’énervement. Elle se contint cependant, et reprit d’une voix posée et dénuée de toute émotion, dont s’échappaient peut-être néanmoins quelques accents d’une dureté ferme.
« Et puis quoi, c’est m’impressionner, que tu essayes de faire avec une démonstration de force aussi mièvre que celle-là ? Ou de me faire peur, peut-être ? De me montrer que tu es un grand méchant et que je ferais mieux de ne plus te contrarier ? Perdu, tu sais que je ne suis ni impressionnable ni peureuse, et il en faut tellement pour ne pas te contrarier que je ne me hasarderai pas à essayer, tu risquerais, comme à ton habitude, de tout interpréter de travers. »
Elle ne voulait plus lui donner la réplique, le jeu ne la satisfaisait pas
« Je n’ai pas envie de te parler. Je n’ai pas envie de te dire que c’est la même chanson sur mon attitude de mère que tu me serines à chaque fois que mes réparties ne te contentent pas, j’ai fait le tour de tout ça il y a bien longtemps. Je n’ai pas non plus envie d’affronter cette espèce de crise de jalousie et de méchanceté que tu es en train de faire, je ne te dois rien. Et oui, tu as toutes les raisons de te montrer jaloux de William, il est brillant quand toi, tu n’as plus aucune originalité, tu… »
Elle se stoppa net. Il n’avait jamais souffert la comparaison et elle avait voulu lui faire mal, appuyer là où elle savait qu’elle pourrait le blesser, juste là, dans son orgueil. Ceci étant fait, elle en avait désormais fini de se montrer hautaine en réponse à ses instincts excessifs. Pour conclure, elle jeta donc un simple coup d’œil harassé au bordel qui résultait du sort du beau brun et déclara, presque sereine :
« Regarde autour de toi, ça se passe de discours. »
Enfin, elle soupira, ses yeux déterminés campés dans les siens : « Va-t’en. Va-t’en, je ne veux plus te voir. »
Elle attendit quelques secondes mais, ne le voyant pas réagir, décida elle-même de s’en aller. Tout endolorie qu’elle était, elle se dirigea donc vers la porte qui la mènerait à nouveau à l’intérieur de la « boîte » – Matthias utilisait souvent un vocabulaire inadapté – où elle rejoindrait William et ses surplus d’inquiétude. Elle se saisit de la poignée et, à nouveau, souffla son exaspération. La tête lui tournait Elle était lasse et voulait juste retrouver son lit, mais ce n’est pas ce qu’elle fit. Prise par une sorte de doute indéfinissable, elle se retourna et observa calmement le compagnon de son adolescence.
« Matthias, dis-moi, à quoi tout ceci rime-t-il ? »
Elle plongea ses prunelles dans les siennes et le dévisagea. Lui aussi, au-delà de la colère, paraissait exténué, et l’un de ses iris brillait de façon étrange. Elle était déçue d’être venue, de l’avoir croisé et même, de chacun des choix qu’elle avait faits depuis qu’elle avait quitté Poudlard, y compris, et peut-être surtout, celui de continuer à le fréquenter. C’est pourquoi, comme unique conclusion, elle haussa les épaules et affecta une moue désenchantée.
« Oh, laisse tomber, je ne suis pas sûre de vouloir le savoir ».
Matthias J. Hobbes ♦ Faculté de Médecine ♦
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Sujet: Re: 'Round midnight - Éléane Sam 21 Mai - 16:44
À quoi tout ceci rimait-il en effet? C'est un jeu. Ça a toujours été un jeu. Mais je suis mauvais perdant et je dois avoir le dernier mot.
« Qu’est-ce que tu essayes de prouver, Matthias ? »
Éléane avait toujours été ma conscience. Tant mieux, parce que sinon, qui sait ce que je serais devenu? Les résultats pour l'instant ne sont pas très prometteurs d'ailleurs... Elle a toujours eu le don de me remettre à ma place, non pas en faisant des démonstrations de force ou en exerçant un quelconque pouvoir, mais plutôt en me relançant tout simplement au visage tout ce que je faisais. Moi qui était pourtant si brillant, si talentueux, si doué... je n'arrivais pas à remettre en question mes actes et mes pensées. C'est une grande faiblesse chez moi et une preuve d'immaturité. Et mon talon d’Achille a toujours suscité chez Éléane des réactions vives et des réponses acérées.
Rien. Je ne voulais rien prouver. Je voulais seulement montrer les dents et grogner. Malgré sa perspicacité, elle n'aimait peut-être pas admettre qu'avec moi, ce n'était plus un combat rationnel ou intellectuel qu'il fallait livrer, mais plutôt une bagarre entre chiens et chats.
Je la sentais impatiente. Exaspérée. Dégoûtée. J'aurais pu la laisser partir pour qu'elle puisse rejoindre le morpion qui devait se demander où nous étions. J'aurais pu me retirer avec plus ou moins de dignité, avant que je fléchisse devant elle et qu'elle soit témoin soit de mon imbécillité, soit de ma faiblesse. Le sang bouillonnait dans ma tête et je pouvais sentir mon pouls tambouriner dans mon ossature. Nous aurions pu en finir là.
« Oh, laisse tomber, je ne suis pas sûre de vouloir le savoir ».
« Et pourquoi aurais-je besoin de prouver quelque chose? »
Doucement, je m'avançai vers elle, l'air faussement calme. Je la sentit se roidir et toucher sa baguette. Elle n'avait pas peur de moi. Je pris son épaule soudainement et sentis une fine pointe peser sur mon plexus. Je savais qu'un autre faux mouvement m'enverrait voler jusqu'à l'autre côté de la rue. Le plus que j'exerçais de la pression sur elle, le plus que je sentais le bout de bois s'enfoncer. « À quoi cela rime-t-il? Tu devrais pourtant l'avoir deviné il y a longtemps. »
Éléane I. Greengrass ♦ Faculté de Politique ♦
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Sujet: Re: 'Round midnight - Éléane Sam 21 Mai - 19:35
Elle s’apprêtait à partir, à fuir, persuadée que ne plus jamais revoir ce visage si familier serait à la source du plus grand bien. Quitte à s’éloigner volontairement des siens, autant le faire bien et n’en délaisser aucun. Surtout pas lui. Surtout pas Matthias. Surtout pas ce petit garçon qui avait parcouru avec elle les pierres froides de Poudlard. Surtout pas cet adulte qu’en cet instant, elle abhorrait au moins autant que son propre frère.
Mais il en avait décidé autrement, et elle n’avait pas eu la force de le repousser. Elle aurait aimé mettre cette mollesse médiocre sur le compte de la douleur de ses intestins et sur celui de l’alcool qui, bien que bu en très minime quantité, lui montait déjà à la tête, mais elle savait, même sans l’admettre, que la déficience était tout autre. Elle qui se donnait des allures de femme forte, d’adulte indomptable et déterminée n’était en fait qu’une petite fille insignifiante, sans personnalité, pas même capable d’envoyer paître un bellâtre excessif du type de Matthias. Ceux-là, pourtant, ne l’avaient jamais intéressée. Que lui resterait-il quand elle aurait accepté cette condition de petitesse ? Que lui resterait-il si elle devait ployer devant lui ?
Sans même qu’elle s’en soit aperçue, l’embout de sa baguette faisait désormais corps avec le tissu qui recouvrait la forte ossature de celui qui avait autrefois été, elle osait le croire, son ami. Ce réflexe ne la servait pas. Il lui donnait, au contraire, songeait-elle, une posture apathique et pitoyable, et cette espèce de gaillard qui la connaissait si bien en profitait pour tenter d’étendre sur elle une supériorité qui n’existait que dans son esprit. Qu’il soit plus grand ou physiquement plus fort ne l’avait jamais impressionnée et encore moins inquiétée, mais Matthias, aussi présomptueux qu’à son habitude, aimait à en douter et, dangereusement, s’approchait encore, semblant ignorer une baguette qui se dressait vers lui bien malgré les intentions de sa propriétaire.
« Et pourquoi aurais-je besoin de prouver quelque chose ? »
Il n’y avait rien à prouver, rien qui ne vaille la peine d’être démontré, elle ne pouvait que marquer son accord. Mais les actes du sorcier, comme souvent, ne s’accordaient pas de ses paroles. Désormais, Éléane percevait le souffle moite de son interlocuteur qui frôlait l’écorce de son front à cadence régulière, elle sentait l’odeur chaude de sa peau se mêler au notes trop fraîches de la nuit et pénétrer la sienne comme pour mieux la contrôler, la posséder. À l’intérieur, la musique battait son plein, et les percussions semblaient se fondre dans l’obscurité, marquant le rythme de leur discussion tout comme celui de leurs propres veines. Elle ne lui appartenait pas, elle voulait qu’il le comprenne, qu’il l’accepte et la laisse partir sans lui demander de s’expliquer, qu’il la laisse faire l’erreur de rejoindre le blondinet qui l’attendait à l’intérieur, qu’il lui laisse le loisir de se tromper, de recommencer et de se tromper encore. Mais Matthias n’avait jamais eu l’art ni la manière de d’entendre quoi que ce soit de ses désirs. Seule sa petite personne comptait, elle ne le savait que trop bien. Et cette petite personne, en l’occurrence bien trop puissante pour sa maigre carcasse encore souffrante, s’emparait brusquement de son épaule et l’enserrait si violemment qu’elle ne put qu’instinctivement resserrer la paume de sa main autour sa baguette.
Matthias ne l’effrayait pas. Son étreinte la blessait, mais elle n’avait pas peur pour autant. Elle voyait, derrière ses faux airs de grand méchant, les traits doux d’un enfant blessé qui demande assistance. Mais les enfants blessés, dans leurs habits souffreteux, traînent avec eux la puanteur qui sied à la violence de leur existence. Et elle n’avait aucune compassion pour cette putréfaction, et moins encore quand, traînée jusqu’à l’âge adulte, celle-ci s’était si bien accrochée aux chairs qu’elle se dégageait par sautes d’humeur telle une pestilence infâme et repoussante. Elle n’avait pas peur, non, mais elle ne voulait pas de son corps si proche du sien ni de son souffle mêlé à sa propre haleine. Mais la pression qu’il exerçait, pourtant, s’accentuait.
« À quoi cela rime-t-il ? Tu devrais pourtant l'avoir deviné il y a longtemps. »
Cette simple phrase fit l’effet d’une bombe dans l’esprit de la jeune femme, qui mit pourtant plus de temps à l’appréhender qu’il n’en fallait, si toutefois elle fut vraiment capable l’appréhender. Elle n’était d’ailleurs pas bien certaine que cette déclaration demande à être interprétée d’une quelconque façon, et elle n’était dans tous les cas pas disposée à se poser la question.
« Qu’est-ce que tu veux que je te dise, Matthias ? Je ne suis pas d’humeur à jouer aux devinettes. Si tu me penses capable de déchiffrer les moindres subtilités de ta pensée versatile, détrompe-toi, tu sais que je suis mauvaise à ce jeu-là. Je ne puis pas compatissante, altruiste ou empathique, pas avec toi. Je ne devine pas, je constate. Je constate que tu n’as rien à prouver, sauf peut-être à toi-même. Au risque de te faire à nouveau ‘des reproches de mère’ : tu te comportes comme un adolescent en pleine crise. Mais si tu n’as pas la maturité de m’exprimer clairement le fond de ta pensée, alors je désolée, mais je ne peux rien pour toi. Alors soit tu me dis clairement ce que je suis supposée deviner, soit je m’en vais. »
Ce disant, la jeune femme voulut faire un pas en arrière pour se libérer de l’emprise de cet étudiant dont la stature lui paraissait infiniment plus élevée que d’ordinaire, mais son talon rencontra la porte close et la bloqua dans son mouvement. Incroyablement flegmatique malgré la proximité du buste de Matthias, ses pupilles quittèrent celles, extraordinairement sombres, auxquelles elles s’étaient jusqu’alors fermement accrochées et considérèrent la main qui enveloppait encore son épaule, comme pour lui sommer de délivrer sa proie. La réponse ne venant pas, elle posa très calmement ses doigts sur ceux du jeune homme pour les désolidariser de son épaule et, les yeux à nouveau dans les siens, constata posément, comme s’il s’agissait de la plus simple des banalités :