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 Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna

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Dalaigh B. McLaughlin

Dalaigh B. McLaughlin
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MessageSujet: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeJeu 5 Sep - 12:32



    Est-ce que mes caresses te semblent fausses, Dalaigh ?

    Le squelette se réveilla en sursaut. Derrière ses paupières, l’image obsédante de Selina lui rongeait les yeux, faisant brûler ses rétines. Ou peut-être était-ce les larmes qui roulaient sur ses joues ? Il les chassa d’un mouvement rapide. La sensation perdurait. Celle des doigts fins qui courraient lentement sur l’intégralité de son corps, jouant avec ses points faibles, griffant occasionnellement ses côtes redessinées. Ses lèvres étaient aussi de la partie et s’acharnaient à lui faire perdre tout sens du réel en embrassant les siennes. Mais la fantaisie, si tentante soit-elle, avait été remplacée par une image bien plus tangible. Celle du corps, mort, allongé sur la table de métal glacé. Et les yeux s’étaient vidés de toute vie alors qu’il tentait de les retenir, de garder encore quelques instants cette femme à ses côtés. Son cerveau s’était révolté. Et maintenant, il était assis sur son lit, les muscles tendus et tremblants tandis que sur son visage, quelques gouttes de sueur perlaient, éclatés par les rayons de soleil qui s’y perdaient.

    Elle était morte. Mais même ainsi, elle hantait ses rêves. Les rares qu’il avait eu depuis sa disparition. Sa main se tendit, attrapant le sachet de plastique transparent qui reposait sur sa table de nuit, défiant les quelques visites qu’il avait eu de faire le moindre commentaire. Le petit tas qu’il restait en son fond était de taille parfaite et Dalaigh l’inspira lentement, s’amusant de la brûlure qui montait dans ses narines avant de se transformer en douce vapeur qui envahissait tout son corps. Ses muscles cessèrent de trembler et se détendirent, son cerveau chassa les images entêtantes sans la moindre difficulté et l’homme eu l’impression de voler dans la facilité. Prenant un instant pour se situer, il se leva ensuite, laissant glisser au sol les légères couvertures qui avaient tentées d’embaumer son corps. Il se sentait bien. La lumière froide de l’Angleterre pluvieuse lui semblait vive et belle, les frissons qui parcouraient sa chair nue paraissaient être des milliers de petites aiguilles chatouillant le moindre de ses nerfs. Son regard était vif, dévorant les plus petits détails. Son cœur battait.

    L’euphorie de la course était encore bien plus forte que d’habitude. Ses talons heurtaient le sol dans un rythme régulier qui lui rappelait celui d’une musique africaine. Les chants des femmes résonnaient même entre les quatre murs de son cerveau. La sueur qui coulait sur son corps lui semblait être les rares rivières qui parcouraient le continent noir et ses foulées accéléraient, encore et encore. Il se sentait intouchable. Les lumières naturelles disparaissaient déjà. Dix-neuf heures. Il avait beaucoup courut. Il devait rentrer.

    L’eau coulait sur son corps, aussi glacé que les aiguilles qui s’infiltraient parfois sous sa peau, déchirant les veines et injectant les doses dont il avait besoin pour rester éveillé. Combien de temps cela faisait-il que Selina avait quitté ce monde ? Que Pearl et lui ne s’étaient pas vus ? Il n’en savait rien. Ne voulait pas savoir. Ignorait les messages en attente et se perdait sous les jets froids. Il devait aller à la Divine Comédie. Quelques affaires avaient besoin d’être réglée. Il devait se perdre. Encore. Toujours plus.

    Les tentures rouges pendaient contre les murs, déjouant les lumières artificielles, les captant et les renvoyant contre les corps presque nus des danseuses et des habitués. Sur les canapés, dans les lits, sur le sol. Partout, les chairs se joignaient dans un ballet décadent encore plus puissant que d’habitude. Un sourire tirait les lèvres gercées du squelette tandis que ses longs doigts effleuraient une poitrine, détachaient quelques boutons, faisaient glisser des mèches de cheveux. Contre sa peau, il sentait la chaleur des corps comme celle, si addictive, de la drogue. Une chevelure capta son attention. Foncée, jouant avec les faisceaux clairs. Longue. Il ne voyait que ces boucles sauvages. Il voulait les toucher. Sa main se tendit, glissa entre les mèches, les attira contre son visage, doucement. L’odeur monta dans son nez, réveillant les souvenirs vagues d’une femme qu’il connaissait depuis si longtemps. Son regard effleura enfin les traits, et il se figea. Un instant. Avant de quitter la danse envoutante dans laquelle il se perdait depuis des heures.

    Nienna. Que fais-tu ici.

    Pas une question. Une phrase. Dépourvue de sentiment. Les seuls émotions qui entraient dans son cerveau étaient celles reliées au plaisir et à la sensualité. Celles ressenties envers la femme n’en faisaient pas parties. Il ne s’en rendait pas compte. Avait l’impression de se comporter comme d’habitude en sa présence. Ses doigts ne quittaient pas les cheveux soyeux et il l’entraina un peu à l’écart, autant pour éviter les mains avides que pour entendre la réponse. Que faisait-elle ici. N’avait-il pas été clair envers son entourage ?

    Je croyais avoir demandé à mes connaissances de ne pas me déranger. De me laisser faire mon deuil. Alors, dis-moi. Pourquoi viens-tu me dérange ?

    Son regard était glacial. Autant que la température de son corps. Et le carcan qui emprisonnait son cœur.
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Nienna Selwyn

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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeDim 29 Sep - 13:08

Depuis combien de temps Nienna marchait-elle, encapuchonnée de son manteau de laine, bravant le froid automnale de Londres pour rejoindre les obscures ruelles du quartier sorcier, traversant celui des Moldus en ignorant les regards curieux de voir une femme si tardivement dehors ? Personne ne le savait, pas même elle. Joshua à l’école jusqu’aux prochaines vacances, Sahel en déplacement pour plusieurs jours, la jeune femme se livrait à ses occupations en toute tranquillité, se méfiant des agissements du Ministère tout en montrant au monde cette image de femme qu’elle avait mis tant d’années à construire. Le bitume faisant claquer ses quelques centimètres de talons dans un assourdissement anodin, quiconque discernait son regard savait que ses pensées hantaient son esprit. Des semaines étaient passées depuis la fin de son contrat avec une société de transports d’animaux magiques, s’étant arrangée pour obtenir des papiers d’autorisation alors que rien n’était considéré comme légal dans l’activité. Des semaines aussi s’étaient écoulées depuis sa dernière entrevue avec Dalaigh, entrevue réelle, où ils s’étaient retrouvés face à face pour discuter d’un passé douloureusement inaccessible. Des semaines dont elle venait d’apprendre les différentes tournures, les derniers évènements et les putains de conneries que pouvaient faire son ami. La ruelle s’allongeant à chacun de ses pas selon elle, elle soupirait d’autant de marche, elle qui aimait pourtant cela dans une démesure presque irréelle pour une sorcière.

Une agitation se fit entendre quelques mètres plus loin. Deux ivrognes se battaient les faveurs d’une femme imaginaire, sûrement d’une beauté enivrante et propre à l’esprit de chaque homme. Quelle était la définition de la beauté ? Une longue et belle chevelure, des boucles ou un lissage parfait, des hanches fines ou prononcées, une poitrine abondante de formes ou finement dessinée. Qu’est-ce que la beauté ? Est-ce cette chevelure noire de jais et ces prunelles perçantes, cette voix sulfureuse, doucereuse et cet accent hypnotisant ?

Nienna disparaissait à l’angle d’une rue, le visage de Selina s’effaçant de son esprit.

Le devant de la Divine Comédie apparut à ses yeux, soigneusement protégé par un colosse qui devait bien faire trois fois sa hauteur et quatre fois sa largeur. Se sentant frêle, ce fut à peine si son assurance ne s’envola pas comme un oiseau, oubliant un instant le pourquoi de sa visite. N’était-elle pas morte ? N’était-ce pas la fin d’une enquête, d’une histoire, d’une vie qui ne le concernait même pas ? Pourquoi s’acharnait-elle à vouloir apercevoir son visage alors qu’un message de colère avait été transmis chez elle par le biais de l’ombre d’un corbeau mystifié ? Aucune visite. Aucune connaissance. Aucun ami. Aucune femme. Aucun homme ne serait admis près de lui pendant son deuil. Deuil qu’il rendait public pour avoir acharner sa soif de vengeance contre l’homme responsable de cette disparition. Que savait-elle, si ce n’est ce qu’elle avait cherché ? Désirait-elle seulement savoir le reste…
Se présentant aux portes, elle se spécifia comme étant une cliente, afin que son arrivée ne soit pas annoncée. Elle qui n’avait jamais prit le temps d’observer les dessous du cabaret, elle s’avançait dans la brume ambiante soigneusement construite pour rassembler les conditions idéales d’une nuit d’ivresse et de jouissance. Des chevelures dansaient, s’agitant sur la musique qui n’était que spectatrice des mouvements de ses marionnettes. Des hommes assouvissaient leur soif en s’éclipsant aux quatre coins de la salle, d’autres ne se contentaient que d’un regard sauvage en direction de formes trop charnelles ou trop fines à leurs goûts. Les rideaux de soie ou de velours s’abattaient sur les murs trop bruts d’un cabaret réputé pour sa douceur ou sa bestialité. Il ne paraissait pas changer de décor depuis les quelques fois où elle s’y était rendu, ne paraissait pas non plus changer de clients, quelques nouveaux, toujours plus jeunes ou plus vieux les uns que les autres se chevauchant sur les fauteuils aussi voluptueux que les femmes présentes. Si elle avait retiré sa capuche et laissait son visage se mêler aux autres, elle n’en observait pas moins les méandres des âmes qui n’existaient plus dans cet endroit.

Tout comme celle qui lui touchait délicatement ses boucles.
Son corps s’immobilisant, ses traits se figeant sous cette douceur pourtant glaciale, elle reconnaissait entre mille la main lui offrant cette tendresse sans en deviner le destinataire. Combien de fois l’avait-il pris dans ses bras en glissant une main affective entre ses mèches, lui avait-il murmuré des mots insaisissables aux autres, l’avait rassuré, apaisé. Se décidant à enfin pivoter son visage d’à peine un quart, la réaction fut immédiate, Nienna disparut dans un angle de couloir, emmenée par une main puissante d’agacement et de colère mais qui ne quittait toujours pas son crâne. A l’écart, dissimulés aux yeux des clients potentiellement avides d’amour éphémère, elle faisait face au regard décemment impuissant d’une réalité qui lui échappait. Fermement tenue droite par cette dextre terrible, la jeune femme plongeait ses prunelles dans celles vides d’un homme qu’elle ne reconnaissait plus. Abaissant son regard à la poche de son blouson, un sachet en sortait comme par curiosité, la défiant de se douter de sa contenance. Un regard qui se posa de nouveau dans celui de Dalaigh, apparemment inconscient de sa réaction pourtant si compréhensible.

« Est-ce ça que tu appelles faire ton deuil, Dalaigh ? »

Si le glacial de ses iris ne l’intimidait pas, le tout de son corps la saisissait avec effroi, incapable d’esquisser le moindre mouvement alors que les danseuses faisaient vibrer leurs muscles dans la salle.
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Dalaigh B. McLaughlin

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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeMar 1 Oct - 9:54



    Son esprit n’arrivait pas à se focaliser sur la femme qui se trouvait face à lui. Ses yeux vagabondaient entre les tentures et les corps enlacés avant de se perdre sur les bouteilles réfléchissantes qui éclataient les jets lumineux pour aveugles les malheureux et éclairer les couples désireux d’intimité, cachés dans les replis des rideaux. Les rideaux, les tentures, les corps. Tout s’enchainait dans une roue infernale. La chanson changea. Ses questionnements internes explosèrent en un millier de papillons invisibles, se glissant entre les notes entêtantes pour faire virevolter leurs ailes immatérielles. Elles aussi réfléchissaient les lumières. Seul son esprit ne réfléchissait pas. Ne réfléchissait plus.

    Sa respiration chaotique soulevait ses poumons comme les soufflets martyrisés d’une vieille cornemuse épuisée et sa tête tourna, s’encra dans les yeux rageurs et peureux. Nienna. Il l’avait oublié. Obnubilé par les reflets bleutés des ailes inventées. Un souvenir s’échappa de son cortex préfrontal. Une pointe de glace transperça son cœur de part en part. Son corps ressentait à nouveau la douleur dû au manque cruel de sommeil et à l’absence définitive de Selina. Deux doigts glissèrent inconsciemment en direction du sachet transparent. Non. Nienna. Ses yeux se relevèrent lorsqu’elle l’interpela. Il décrypta ses paroles. Lentement. Regardant ses lèvres bouger sans saisir le sens des mots, premièrement. Puis l’analyse, la compréhension. Son sang qui ne fit qu’un tour.

    « Est-ce ça que tu appelles faire ton deuil Dalaigh ? »

    Qu’est-ce que ça peut te foutre ? Chacun se recueille à sa façon. Certains se renferment. D’autres deviennent des bêtes de sexe. Et n’oublions pas ce qui ont peur de la mort et qui profitent de la vie ! Tu préfères que je sois apathique dans un coin, c’est ça ?

    Le hurlement de rage dans lequel s’était inscrite la dernière phrase entraina le regard interrogateur de plusieurs personnes proches. Les ignorants purement et simplement, Dalaigh attrapa un verre qui se trouvait à sa portée et le vida entièrement. Le liquide pur brûla sa trachée, emportant les rages et les souvenirs dans ses effluves alcoolisés. […] Pourquoi Nienna se trouvait-elle au cabaret ? Il ne l’avait pas vu arriver, il devait la saluer ! L’attitude de rejet qu’elle abordait à son égard le laissait perplexe. Ils ne s’étaient pas vus depuis si longtemps. Ils devaient rattraper le temps. Parler. S’expliquer. Il devait lui montrer, aussi. Ses souvenirs, étalés sur des dizaines de feuilles en papier. Ses souvenirs, barbouillés de peinture et d’eau. Ses souvenirs, sur les pages gondolées. Imposés à la face de tous. Dans son bureau. Il fallait qu’il lui montre, le désordre qu’il avait retranscrit en dessins. Son désordre. Leurs vies. Il fallait qu’elle le laisse approcher. Son esprit embué le fit s’exprimer avant qu’il n’ait le temps de penser.

    Nienna ! Quel plaisir de te voir, viens, prends un verre.

    Passant un bras autour des épaules de son amie, l’homme l’entraina en direction du bar. Les bouteilles. Elles réfléchissaient les jets de lumières et éclairaient les couples qui se croyaient discrets. Il l’avait déjà vu… Il le voyait tous les soirs. Les corps, les danses, les regards des hommes. Nienna. Ses cheveux. Un flash roux. Un autre. Noir. Selina. Sur cette table de métal. Ses jambes se dérobèrent sous son corps et il se rattrapa au bois solide sur lequel étaient entreposées diverses bouteilles qui tintèrent sous le choc. Une pression sur son épaule. Un regard noir en direction d’un inconnu. Il se releva. Fixa ses prunelles dans celles de Nienna. Se retourna. Passa une main sur son visage, porta le sachet à son nez et inspira. La douleur prévisible de la drogue qui lui détruisait les sinus et le cerveau. Elle disparut. Fut remplacée par le calme. Il se retourna, vit Nienna. Depuis combien de temps était-elle là ?

    Pourquoi tu  es ici ? Je n’ai pas besoin de toi.

    Il s’assit sur un tabouret haut. Enfouit son visage dans ses mains. Fixa la brune. Les flashs se succédaient, superposant les visages connus, les visages aimés. Il voyait Pearl. Il voyait Selina. Il voyait Chess. Les longueurs de cheveux étaient balayées par les psychotropes, ignorées par l’esprit perdu. Seules les teintes changeaient. Et les visages. Les formes. Selina. La taille fine. Pearl. La masculinité confondante. Chess. Le visage inquiet… Nienna. Une larme roula sur la joue insensible lorsque le visage de son amie se stabilisa devant ses yeux embués.

    Aide-moi.

    La musique faisait vibrer son corps, le rythme lourd des basses jouant à remuer son estomac et son cœur dans une danse interne. Il aurait voulu disparaitre. Se fondre dans ces battements d’ailes et de notes. Ne plus réfléchir. Ne plus avoir mal. Ne plus voir le visage de Nienna, tout au moins aussi dévasté que le sien. Possiblement plus. Le sien. Le sien l’était possiblement plus. Dévasté. Ses pensées étaient incohérentes. Il se comprenait. Du moins, il croyait se comprendre. Eventuellement.
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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeDim 20 Oct - 11:47


Violence.

Nienna ignorait les regards curieux ou ignorés de ceux qui croisaient leur chemin. Leur chemin, à Dalaigh et elle. Quel chemin parcouraient-ils ? Le visage en sueur de l’homme à qui elle était venue rendre visite lui arracha un rictus de pitié. Le verre qu’il s’empressa de prendre et de vider d’un trait ne fit que l’écœurer un peu plus. Elle s’écarta. Visa du regard la porte menant au couloir de sortie et se décida à s’y rendre. Derrière, la ferveur de corps enivrants résonnait, les râles d’un plaisir fictif bravaient le son d’une musique qui nous faisait abandonner tous sens. Nienna se fit accaparé par un homme qui ne semblait pas être doté de toute sa conscience. D’un geste rapide, il disparut derrière le dossier d’un canapé, la jeune femme, en ce soir, peu encline à faire de cadeaux. Son prénom s’immisça entre deux notes, elle eut à peine le temps de comprendre la suite des paroles que prononçait Dalaigh tandis qu’il l’emmenait d’un bras affectif autour de ses épaules vers le bar du cabaret. Ses prunelles plongèrent dans celles enjouées de l’homme, devinant des terminaisons nerveuses beaucoup trop sollicitées pour une normale. Silencieuse. Elle n’avait jamais été autant silencieuse. Elle refusait de s’asseoir, accepta ou n’accepta pas un verre qui se posa devant elle. Il tomba. Se rattrapa. Elle n’eut aucun geste. Ne le gratifia d’aucune aide pour qu’il puisse se relever, celui goûtant à cette politesse se voyant attribuer une ombre glaciale au fin fond de ses iris. Elle observait. L’observait. S’écrouler. La dénigrer. Elle savait la fin de cette scène pittoresque d’un homme plongeant inconsciemment dans son propre sang.

Pourquoi tu es ici ? Je n’ai pas besoin de toi.

Un sourire amusé étira légèrement ses lèvres, à demi. Comme un croissant de lune, son visage s’était animé de ce sourire. Silencieuse. Toujours aussi silencieuse. Sa main s’était posée sur le comptoir du bar où la jeune fille passait inlassablement son chiffon humide. Il tomba à nouveau. De fatigue, cette fois-ci. De nervosité, d’incompréhension, de perdition. Une larme se laissa même sécher sur sa joue. Impassible. Nienna écarta un verre d’alcool. Que devenait-on lorsqu’on se perdait dans son propre monde ? N’est-ce pas ce que tu voulais, Dalaigh, te retrouver là ? Assis sur ce tabouret haut sans savoir où tes pensées se trouvent, où ton corps subsiste et où ton esprit vagabonde ? T’y voilà.

Aide-moi.

La jeune femme saisissait alors le bras de son ami pour le soutenir. Dans ce geste qui tentait de l’aider à se relever et surtout à se tenir debout pour assurer une prestance devant les clients, Nienna transforma son emprise en une position de galanterie, comme si Dalaigh lui offrait son bras. Elle ne savait si elle lui rendait service, mais il paraissait déjà avec un plus d’allure qu’une minute auparavant. Retraçant leurs pas dans le sens inverse, elle conduisait le patron vers les couloirs menant à son bureau. Même si qu’une ou deux personnes les remarquaient, elle savait que cela aurait été bien pire s’il s’était définitivement écroulé à la table de ce client-ci ou un autre. Traversant les portes, esquissant un sourire de politesse à des employés qui les saluaient, Nienna poussa le liège et le velours de l’entrée, parvenant enfin à l’endroit reclus du propriétaire des lieux. Le soutenant cette fois-ci correctement, elle le poussa à s’asseoir sur un des fauteuils présents et s’écarta quelques instants. Sortant sa baguette, elle visa un bol du regard avant de trouver une serviette traînante.

« Aguamenti. »

Son murmure se fondit dans les quelques notes qui parvenaient encore du salon commun. Déplaçant un tabouret près du fauteuil où il se trouvait, elle y déposa le récipient, se postant alors près de lui avant de plonger la précédente serviette dans l’eau glaciale. Toujours vêtue de son manteau, son capuchon tombant le long de son dos, la jeune femme épongea le front de son ami, retirant le foulard qui lui servait à masquer ses stigmates. Elle ne pensait même pas à la cause de ce mal être. Se fichait sensiblement de savoir ce que lui dirait Sahel lorsqu’elle lui ferait part de sa visite. S’ennuyait déjà de la prochaine réunion qu’avait organisé les Yaxley pour on ne savait encore quelles raisons. Simple prototype des Malefoy ou mise en scène de ceux-ci. Sa main habillée de l’éponge descendait le long d’une peau noirâtre, effleurait les encres sensibles d’un art moldu et rafraîchissait de frissons les quelques endroits encore purs. Retirant le sachet presque vide dépassant de sa poche, Nienna lui retira aussi sa veste, déposant ces objets sur le bureau, se sachant observer d’un œil ou deux. Même si elle lui tournait le dos, ils avaient eu cette faculté et cet apprentissage à toujours deviner, anticiper chez l’autre le moindre de ses mouvements. Désappointée. Ses mains restaient immobiles tandis que ses prunelles se baladaient sur la surface boisée du meuble. Des papiers. Des signatures. Des sachets. Des cachets. Des stylos, des bougies, des vêtements à droite, à gauche. Des photographies. Rien de plus, rien de moins. Elle n’avait encore prononcé mot. Rien. Et pourtant, deux, seulement deux, raclaient sa gorge dans une démangeaison tellement puissante qu’ils ne purent s’échapper que dans un soupir.

« Ça suffit. »
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Dalaigh B. McLaughlin

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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeJeu 13 Fév - 13:09


    Il sentit la douceur de son bras se glisser sous le sien, se tendre, le soutenir. Dans une lueur de conscience, il vit qu'il avait l'air normal. Au bras d'une amie. Un homme à la peau encrée qui se tenait, fier, droit. Noble. Son rêve s'effondra rapidement lorsque l'image d'un éclair vert traversa son esprit comme un serpent vicieux qui lui rappelait sans cesse son sang gâché. Relents de son enfance qui allaient et venaient comme bon leur semblait. Velours, velours, tâchés de lumière et de plaisirs humains. Velours de ses doigts sur la peau. Velours, le bruit de ses talons sur le sol. Velours, les bras accueillant du fauteuil. Frissons sur son corps lorsque la veste glisse le long de ses bras, perte de force dans sa nuque qui lâche et laisse tomber la tête sur le torse, comme sonnée par le contrecoups des filaments blanchâtres qui faisaient pulser son corps. Velours, les cris qui résonnent dans ses oreilles, lui hurlant de fermer les yeux, le priant de se laisser aller. Glace. Le filet d'eau glacé, brûlant les entrelacs de sa peau noircies, lui fit pousser un gémissement de satisfaction. Ses yeux roulent dans ses orbites, mouvement incontrôlés dus aux vapeurs d'alcool et aux poudres qui ravageaient ses veines, puis s'ouvrent d'un seul coup, sa main part et s'arrête, à quelques millimètres du poignet de Nienna. Ce n'est qu'elle. Pas une menace. Juste une amie. Il se laisse faire, cède au froid qu'elle lui impose, l'embrasse, se plonge dedans. Ferme les yeux. Se force à ignorer le vide qui se crée dans sa poche, le vide qui se crée autour de lui lorsque la femme s'éloigne. Les doigts de Nienna firent frémir le sachet bruyant, dévoreur de vie, fossoyeur des rêves.

    « Ça suffit. »

    Ses yeux s'entrouvrent, son cœur se calme, le sol se stabilise sous ses semelles et il se força à lever les yeux. Autour de lui, les murs continuent leur danse virevoltante, les bruits semblent lointains, comme étouffés par une pensée nouvelle qui s'insinue, se glisse, tourbillonne puis s'installe. Cela suffisait, certes. Mais il n'était pas sûr de le vouloir. Il était tellement plus facile de s'abandonner, d'oublier, de se voiler la face. Malgré les images qui revenaient le hanter lorsque le sommeil le prenait, malgré les violentes douleurs qui lui perforaient parfois le thorax, il se sentait bien lorsqu'il n'était pas dans son état normal. Il se sentait libre. Libre de la douleur, libre des sentiments, libre de toutes ces normes stupides que la société, sorcière comme moldue, se forçaient à imprimer sur les êtres. Il voulait être libre. Mais cela suffisait. Personne n'était libre. Mis à part les morts. Et il ne pouvait pas mourir, le contraste imprimé sur sa peau le lui interdisait dans une mordante ironie. Le souvenir de Selina le lui interdisait. Celui de Chess. Les prunelles de Nienna, également. Il ne pouvait pas mourir. Il ne pouvait pas être libre.

    Je pensais pouvoir être libre, Nienna. Libre. Tu comprends ?

    Sa voix pâteuse s'atténua dans un rire baigné de larmes Si quelqu'un pouvait comprendre, était-ce bien Nienna ? Son cerveau ne fonctionnant plus normalement ne savait pas répondre à la question qui se perdit rapidement dans les limbes de ses noirceurs personnelles. D'un geste doux, il effleura la joue de son amie et un sourire naquit sur ses lèvres avant de disparaitre dans une petite grimace de douleur. Les lames de feu qui courraient dans son corps n'étaient plus alimentées et réclamaient de la compagnie jusqu'à être calmées. Le regard de la femme, la présence de ses doigts sur la peau. Encore une fois, un flash de cheveux roux se superposa sur la tignasse foncée et il ferma les yeux et les frotta de la paume. Les dessins psychédéliques colorés se formèrent derrière ses paupières, se transformèrent, disparurent, collapsèrent avant de s'effacer pour faire place à la lumière électrique du bureau. L'effet de la cocaïne de dissipait déjà... Le temps courrait si vite lorsque la substance faisait son chemin entre les parois de ses veines bleutées mais semblait s'étirer quand la prise n'était pas régulière. Combien de temps avait passé depuis que Nienna était à ses côtés ? Il chercha une horloge des yeux, n'en trouva aucune, sentit une chose mouillée couler le long de sa joue. L'attrapant du bout d'un doigt, il la fit scintiller face à l'ampoule avant de comprendre qu'il s'agissait d'une larme. Pourquoi pleurait-il ? Lui-même n'en avait aucune idée.

    Combien... Combien de temps tu... Non attend. C'est pas ça. Depuis combien de temps tu es ici ? Je descend...

    S'il se doutait bien d'une chose, c'était que Nienna resterait à ses côtés tout au long de sa chute. Jusqu'à ce qu'il ait mieux. Au moins. Ses yeux se fermèrent, comme si une douce touche s'était posée sur ses paupières et lui murmurait que tout irait bien, qu'il pouvait dormir. Son corps était épuisée, son esprit presque éteint. Lentement, sa cage thoracique ralentit son mouvement, s'arrêtant presque. Les volutes chaleureuses de l'inconscience lui tendaient les bras, accueillantes comme les draps du lit d'un enfant, comme les jambes ouvertes d'une femme offerte, comme la bouche attractive d'un homme dont il ne connaissait pas la part d'humanité. Lentement, il se laissa glisser dans ces eaux noires et sentit ses pensées s'éteindre une à une. Il était libre. Le temps d'une seconde. Un soubresaut de conscience lui hurla que si cette pensée s'éteignait aussi, il aurait beau être libre, il ne le saurait pas. Son corps se tendit dans une grande inspiration et il entendit, au loin, le son de son dos craquer sous la cambrure qu'il lui imposait sans s'en rendre compte. Un papillonnement passa entre ses cils qui refusèrent de se séparer le temps d'un instant et bientôt, il retrouva la vue.
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Nienna Selwyn

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Double-compte: Lily L. Potter.
Travail/Etudes: Activités inconnues.

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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeVen 28 Fév - 15:46


Je pensais pouvoir être libre, Nienna. Libre. Tu comprends ?

Libre. Qu’était-ce que la liberté ? Est-ce seulement la présence d’une alternative, d’un choix, d’une possibilité autre que celle que l’on nous impose ou bien simplement la sensation de se sentir voler au gré du vent et des marrées, la sensation de suivre ce que bon nous semble et l’envie d’écouter ce que nous voudrions uniquement entendre ? La liberté se gagne ou se perd. Ne dit-on pas que nous ne naissons pas libres et égaux ? On se sent plus libre aujourd’hui que demain, on se saura plus vivant demain qu’aujourd’hui. Relative. C’est une notion tellement relative. Etait-ce vraiment ce filament de poudreuse blanche qui pourrait donner une explication à cette notion indéfinissable ? Personne n’est jamais totalement libre. La liberté se vie. Elle ne se subit pas.

Cette main s’était arrêtée si près de son poignet que son cœur en avait loupé un battement. Et s’il ne s’était pas rendu compte que c’était elle, s’il était allé au bout de son geste, que se serait-il passé ? Si cette putain de substance lui avait bouffé le cerveau, lui avait effacé plus que tous repères, l’avait achevé de souvenirs inexistants, que serait-elle dans cette pièce ? L’aurait-il réduit autant en poussières que ce qu’il s’imaginait dans l’esprit dérangé que lui provoquait la cocaïne ? Après tout, il avait bien repris conscience avant de lui embrocher le bras. Elle lui faisait confiance.

Son esprit le quittait. Sa conscience divaguait. Son corps ne répondait plus aux appels glacés de l’eau qu’elle lui appliquait sur le visage. Il pleurait et ne paraissait même pas s’en rendre compte. Il descendait, s’engouffrait, rêvait, cauchemardait. Subissait. Où était la liberté dans tout ça ? Le bras du fauteuil accueillit le poids de son corps, ses prunelles tentant désespérément de saisir celles de Dalaigh prit dans un tourbillon sans fin. Cela durait depuis une bonne vingtaine de minutes déjà, au moins. Même elle n’avait plus aucune notion du temps tellement ses yeux brûlaient de le regarder.

Combien… Combien de temps tu… Non attends. C’est pas ça. Depuis combien de temps tu es ici ? Je descends…

Elle ne prit pas la peine de lui répondre. Dégagea sa nuque du tissu chaleureux et posa sa main glaciale sur le creux de son bras. Réveilles-toi. Oubliant l’eau, oubliant sa soif, oubliant ses râles, elle attendit. Patienta. Pensa.

Flashback.

« Et le jour où tu seras dans le pire des états, tu ne penses pas que je serais auprès de toi, que j’attendrais que tu ailles mieux et que tu ouvres les yeux ? »

Nienna hurlait sa colère dans le parc ensoleillé du château de sorcellerie, sa baguette pendante de la poche de son jean délavé. Ses prunelles sombres contrastaient avec les rayons de soleil jaillissant de toutes parts, éclairant sa peau comme un diamant alors que d’autres s’étaient allongés plus loin pour dorer leur peau. Face à elle, Dalaigh, tout aussi fermé qu’elle et qui refusait de répondre à toutes interactions, ce qui avait le don de la mettre dans le pire des états. Cela faisait bien deux semaines qu’ils ne s’étaient pas adressé la parole depuis que le jeune homme avait clairement annoncé son intention de quitter le pays à la fin de sa septième année. Ils en étaient à quelques mois et voilà qu’ils ne cessaient de se disputer. Enfin, que Nienna, particulièrement, n’arrivait pas à faire abstraction de ce sentiment d’abandon. Qu’elle était puérile.

« T’as pas le droit, tu n’as PAS le droit ! Tu ne peux pas me laisser toute seule alors que je vais me marier, tu ne peux pas ! »
Tu vas quoi ?

Le souffle de la jeune fille se coupa dans l’élan de son énervement. Elle ne le lui avait pas dis, ne lui avait pas fait part de la nouvelle, n’avait pas encore eu l’occasion de le convier. Pourtant, bien avant Sahel, il était sa seule famille. Le seul qui n’avait jamais autant compté à ses yeux. Elle venait de gaspiller quinze jours dans leurs vies, dans leurs amitiés, dans leurs fraternités.

« Je vais me marier. »
Depuis quand ?
« Depuis… depuis qu’il m’a demandé de l’épouser, il y a une semaine. »

Il n’avait jamais paru aussi calme. Pas détendu. Calme. C’en était déstabilisant et frustrant. Elle ne savait que faire d’elle-même. Dansait sur chaque pied comme si un torrent de flammes brûlait sous elle. Ses yeux étaient redevenus d’un bleu flamboyant, plus clément, plus doux. Désolé.
Il l’observait avec tellement de puissance qu’elle n’osa redresser sa baguette prête à tomber. Nienna sentait cette douleur du remord emparer ses entrailles et les serrer si fort qu’elle en étouffait. Encore une fois, le parc faisait frais de leurs déboires plus que de leurs bonheurs.

Tu vois, ça non plus, tu n’as pas le droit.

Quoi, quoi ? Dalaigh, non, attends, ne pars pas…
Mais cette fois-ci, ce fut bien lui qui lui tourna le dos.

Flashback.

A nouveau, ses iris sombres tombèrent dans les siennes, mais avec cet esprit d’impuissance. On en oubliait presque le lieu de débauche dans lequel ils se trouvaient. Soigneusement bâti par les mains et les soins de celui qui ne remuait un seul muscle. L’eau dans un verre de vin stagnait en attendant son retour complet. Le high était fort, n’est-ce pas ? C’est ça la descente, mon amour. Il y a forcément une fois où nous n’en revenons pas entiers.

« Bois un peu d’eau. »

Ce n’était pas une recommandation. Mais bien une obligation. Laissant le filament de liquide se déverser lentement dans la gorge de son ami, Nienna observait la moindre de ses réactions. C’était fini. Fini tout ce mal. Terminé toute cette souffrance. Elle ne le permettrait plus. Ne l’admettrait même plus près d’ici.

« Je suis là, ça ira. Ça ira. »

Comme une promesse, ces mots glissèrent de ses lèvres à son oreille.
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Dalaigh B. McLaughlin

Dalaigh B. McLaughlin
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MessageSujet: Re: Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna   Willst du dich von etwas trennen dann mußt du es verbrennen | Nienna Icon_minitimeLun 31 Mar - 16:06


    « Bois un peu d’eau. »

    Le filament glacé coula le long de sa gorge, refroidissant les lames brûlantes qui découpaient ses entrailles et son cœur. Longtemps, ses yeux papillonnèrent pour mieux se refermer et son esprit glissait, encore et encore dans les vagues sombres de ses souvenirs. Les mots de Nienna murmuraient à ses oreilles, comme des milliers de papillons virevoltant entre ses tympans. Il les entendait, les rattrapait entre ses doigts et les emprisonnait en formant une prison d’os. Puis il les laissait s’envoler, au loin, dans le vide embué de ses pensées. Quel jeu amusant.

    Quelques heures plus tard


    Ses yeux papillonnaient. Encore. Mais cette fois, les rayons du soleil, perçant entre les tentures lourdes de la pièce, brûlèrent ses rétines et l’aveuglèrent momentanément. Et sa vue se stabilisa. Sur le fauteuil à ses côtés, Nienna, endormie, le bras passé au-dessus de l’accoudoir, ses doigts mêlés aux siens. Les cheveux en bataille. Les cernes légèrement creusés. Un peu plus loin, un verre d’eau, abandonné, rempli de petites bulles. Un sachet. Vide. Un manteau, en vrac sur le sol. Dalaigh passa une main sur son visage. Sa peau lui faisait mal, craquait sous ses doigts, se détachait de sa chair et tombait en lambeau sur le sol. Du moins, c’était l’impression qu’il avait. Tout son corps lui semblait se dessécher sur place.

    Les doigts de l’homme se libérèrent de ceux de la brune et il se leva, vacillant quelque peu mais s’aidant du mur pour se stabiliser. Sa tête lui hurlait de s’asseoir, de dormir encore. Mes ses jambes avançaient, attirées par le silence assourdissant qui régnait dans le bâtiment. La musique s’était tue depuis longtemps mais les femmes de ménage devraient être en plein travail. Sous ses pas, les escaliers grincèrent par endroit, se turent à d’autres mais surtout, murmuraient au contact de ses talons. Les niches étaient vides, la salle principale également. Partout, le propre régnait déjà et seule une bouteille abandonnée faisait acte de présence sur une table à l’écart.

    Le squelette se laissa tomber dans un des canapés soyeux, ferma les yeux et se laissa porter par les souvenirs qui revenaient par vague, flous et haut en couleur. Les corps des femmes, rien de plus normal dans son établissement. Les lignes de poudreuse, les verres d’alcool qui les accompagnaient. Là encore, rien de plus normal depuis… Depuis qu’elle… Dalaigh secoua la tête avec force et se frappa le front afin de se concentrer à nouveau. Son comportement, bondissant et changeant envers sa meilleure amie, sa confidente. Celle qu’il avait toujours admirée, aidée, aimée. Un soupir franchit la barrière de ses lèvres noires et il passa une main lasse sur son visage.

    Flashback


    « Je vais me marier. »
    Depuis quand ?
    « Depuis… depuis qu’il m’a demandé de l’épouser, il y a une semaine. »
    Tu vois, ça non plus, tu n’as pas le droit.

    Il tourna les talons. Son cœur en miette. L’herbe craquait sous ses pas. Dans son dos, le regard de Nienna lui brûlait les omoplates. Il pouvait entendre ses pensées, les devinait comme s’il se trouvait dans sa tête. « Ne pars pas, retourne-toi, pardonne-moi. Reste. » Mais il ne pouvait pas. Une boule dans sa gorge l’empêchait de respirer correctement. Il avait envie de disparaitre. Il allait disparaitre, maintenant qu’elle n’avait plus besoin de lui, exclusivement de lui, principalement de lui. Pourtant, il veillerait toujours sur elle. Toujours. Qu’importe le moyen, qu’importent les fuseaux horaires, qu’importe la distance. Elle serait sa priorité de l’autre bout du monde. Car il partait. Et elle ne le saurait que trop tard.

    Flashback


    La tête dans les mains, Dalaigh abordait un léger sourire alors que, derrière ses yeux clos, défilaient les images de bons moments en compagnie des femmes de sa vie. Nienna, d’abord. Selina, ensuite. Les deux avaient tant de points en commun. Avait-il envie de compenser la perte de l’une par la présence de l’autre ? Ses prunelles claires captèrent à nouveau les rayons du soleil qui réchauffaient sa peau. Le calme était revenu. Ou peut-être était-il venu, tout simplement. La douleur dévorante s’était muée en pique régulière, les larmes détournées en rage s’étaient asséchées. Son corps ne tremblait plus d’amertume. Il se mit sur ses pieds, se dirigea vers la cuisine et entreprit de confectionner le petit-déjeuner préféré de son amie. Puis, il posa les plats sur un plateau, monta les escaliers en contenant tant bien que mal les spasmes irréguliers de ses membres en manque de poudre blanche, poussa la porte et entreposa le repas sur le bureau.

    L’odeur des boissons chaudes sembla réveiller la belle endormie car ses cils papillonnèrent avant de dévoiler son regard perçant. Les lèvres de l’homme se tirèrent dans un sourire figé et les mots qu’il avait préparés ne passèrent pas le fond de sa gorge. La boule remonta de son estomac et se coinça dans sa poitrine. Son souffle se saccada quelque peu mais il tourna le dos aux yeux inquisiteurs et colla son front contre la vitre fraiche qui surplombait le quartier de Londres. Les nuages emprisonnaient maintenant par endroit les dards chauds qui dansaient auparavant avec l’évaporation de la fine couche d’humidité dont le sol était recouvert. Au loin, on pouvait même deviner le rideau de pluie qui virevoltait sur les feuilles d’Hyde Park. Ou un autre parc, peu importait, réellement. Le bruit des porcelaines qui se heurtent le força à quitter les bras apaisants des éléments extérieurs mais son corps ne se retourna pas pour autant.

    Je suis désolé pour tout à l’heure. Mais merci. Je ne sais combien de fois tu as sauvé ma vie mais ça ne devait certainement pas être la première.

    Les bras croisés dans le dos, il se retourna enfin pour faire face à Nienna et fixer son regard dans les yeux ensorcelants de la jeune femme. La forme de son visage, ses prunelles volontairement vides, ses lèvres quelque peu pincée. Le buste droit. La petite fille était devenue une vraie femme, une femme magnifique et que l’on craint, qu’elle soit dans nos amis ou nos ennemis. Surtout nos ennemis. Impassible. Elle attendait. Il savait que maintenant, c’était à lui de parler. De faire avancer la situation. Le voulait-il ?... Il ne savait. Elle lui avait tellement apporté, lui avait tellement pris. La situation était pareille du point de vue féminin. Et ils savaient que, maintenant qu’ils s’étaient retrouvés, il leur serait impossible de se quitter. Du moins, pas comme avant. Pas comme la première fois. Ils avaient trop à perdre. Il avait trop à perdre.

    Tu n’étais pas obligée. Pourtant, je suis heureux que tu ais agis.
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